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Running / Compte-rendu
12 Juillet 2025 - Par Rémi Bellevegue
Mise à jour : 4 Novembre 2025 (15h44)
Photos : © Paola Tertrais / FFA
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Hilary Gerardi a décroché la médaille d’or sur le trail long à Val d’Isère lors du High Trail Vanoise, course support du rendez-vous national. Une victoire forte en émotions pour la traileuse née aux aux Etats-Unis et naturalisée française il y a deux ans. Chez les hommes, le champion du monde et vice-champion d’Europe Benjamin Roubiol l’a emporté en patron, en étant quasi tout le temps aux commandes de la course.
« Une journée de ouf ». Installée depuis quinze ans dans l’Hexagone, Hilary Gerardi, native du Vermont au nord-est des Etats-Unis, maitrise sur le bout des doigts les expressions hexagonales. Et a trouvé le bon terme pour définir ce samedi ensoleillé lors duquel elle « en a pris plein les yeux », notamment en apercevant en pleine ascension du col de l’Iseran « des gypaètes barbus », ces grands vautours aux ailes étroites. Dans le décor de carte postale de la Vanoise, entre Haute Tarentaise et Maurienne, la traileuse de 38 ans a surtout réalisé une course de toute beauté. En gérant idéalement son effort sur un parcours périlleux et d’une grande technicité, avec au programme 72,4 km et 5056 mètres de dénivelé positif. Un tracé qui collait à ses qualités de grimpeuse hors-pair, elle qui détient le temps de référence féminin de l’ascension du Mont-Blanc.
La sociétaire du Chamonix Mont Blanc Marathon a longtemps occupé la deuxième position, à distance d’une Anne-Lise Rousset qui semblait dans un premier temps au-dessus du lot. « J’ai essayé de ne pas trop pousser dans la première partie, pour véritablement commencer ma course à Bonneval », expliquait quelques minutes après l’arrivée Hillary Gerardi. Dans ce charmant village, atteint au bout de 47 km et près de six heures d’effort, dont une première ascension du col de l’Iséran, elle s’est assise et a pris son temps pour se ravitailler, pendant que la boulangerie locale était prise d’assaut par les accompagnateurs. « Cette stratégie mise en place avec mon coach et ma préparatrice mentale a marché », constatait-elle.
Car à la fin de la deuxième montée de l’Iseran, ponctuée d’un passage par l’aiguille Pers à 3341 mètres d’altitude, elle avait la surprise de dépasser la favorite Anne-Lise Rousset, quasi à l’arrêt et contrainte à l’abandon sur ce tracé redoutable où, entre l’adaptation à l’altitude et la chaleur sur les portions moins hautes, les organismes en ont bavé. Il fallait encore tenir jusqu’au bout, ce que cette grande technicienne, qui vit à Sermoz dans la vallée de Chamonix avec pour terrain de jeu les sommets alpins, a admirablement bien fait dans l’ultime descente menant vers l’arrivée en plein centre de Val d’Isère, pour l’emporter en 9h25’27’’.
Avec cette victoire, Hillary Gerardi devient prioritaire pour la sélection pour les championnats du monde de Canfranc en Espagne (25 au 28 septembre). « Je visais l’équipe de France, c’est un rêve et un investissement », savourait, des sanglots dans la voix, celle qui est installée depuis quinze ans dans l’Hexagone, son « chez-moi ». Jennifer Lemoine et Anne-Cécile Thévenot, respectivement médaillées d’argent et de bronze en 9h32’18’’ et 9h34’18’’, prennent, quant à elle, une belle option pour l’Espagne.
La première, licenciée à l’AL Echirolles, a laissé filer lors de la première partie de course. Avant de réaliser une remontée impressionnante en faisant, elle aussi, la différence après Bonneval. « Je n’étais pas du tout dans les premières sur les premiers ravitos, retraçait la traileuse de 39 ans domiciliée dans le Trièves, au sud de l’Isère. J’ai fait ma course, je me suis concentrée sur moi, et ça a payé. Je suis super contente. On m’aurait dit il y a cinq-six ans que je pourrais finir deuxième d’un championnat de France avec une telle densité, je n’y aurais peut-être pas cru. » Troisième du trail long des France à Salers en 2022, elle estimait « la saveur différente » ce samedi, alors qu’elle n’a jamais été aussi près d’une première sous le maillot bleu.
L’équipe de France, Anne-Cécile Thévenot l’a connue dans une autre vie, entre 2005 et 2008, avec notamment trois participations aux Europe de cross en juniors et espoirs. L’athlète née en 1986, comme ses deux devancières sur le podium, a avalé les premiers kilomètres à vive allure et aurait pu le payer cher. « J’avais l’impression d’être à mon rythme, mais je crois que je suis partie trop vite, confiait-elle. Dès le premier ravito, j’avais limite des crampes. Ça a été très dur ensuite. » Mais, « au mental », elle a eu le mérite de ne rien lâcher pour s’offrir une première récompense nationale sur les sentiers. Un bonheur qui ne l’a pas empêchée d’avoir « une petite pensée pour Anne-Lise » Rousset, alors que les 4e et 5e places sont revenues à Agathe Bes (Savoie Maurienne Trail) en 9h40’48’’ et Sarah Vieuille (Athletic Vosges Entente Clubs) en 9h47’16’’.
La course masculine a aussi eu droit à son lot de défaillances et de remontées. Même si, à l’avant, le déroulé a été d’une certaine fluidité. Si Nicolas Petitfrère a animé les premiers kilomètres, un duo composé de Benjamin Roubiol et Louison Coiffet a rapidement pris les commandes. Soit le champion du monde et vice-champion d’Europe en titre, d’un côté, et le prometteur montagnard du massif des Ecrins, habitué aux efforts plus longs, de l’autre. La deuxième ascension de l’Iseran a, de nouveau, fait office de juge de paix, puisque l’international d’Annecy Athlétisme a réussi à creuser un petit écart sur le trailer de 25 ans qui porte les couleurs du Team Provence Endurance. Mais ce dernier n’a jamais renoncé et, à l’arrivée, seules deux minutes séparaient les deux hommes, avec 7h48’36’’ pour Benjamin Roubiol et 7h50’34’’ pour Louison Coiffet.
Si Roubiol, l’enfant du pays né à Moûtiers en Tarantaise, a donné l’impression de contrôler la situation, il ne faut pas toujours se fier aux apparences. « Ça a été très dur, il y a eu des moments où je me suis vraiment senti en souffrance », avouait-il. Il faut dire que les derniers jours n’avaient pas été de tout repos, puisque malade depuis deux semaines, il avait longuement hésité avant de se présenter au départ. Son dauphin, malgré son retour sur la fin, ne nourrissait « aucun regret. La date et le parcours me permettaient enfin de préparer un championnat de France dans de bonnes conditions, soulignait le vainqueur du trail de Bourbon à La Réunion l’an dernier. J’affectionne particulièrement le 100 km. Là, c’était vachement plus court. Être annoncé et répondre présent, c’est une grande satisfaction. »
Longtemps en bonne position pour les accompagner sur le podium, Antoine Thiriat (Athletic Vosges Entente Clubs), finalement 9e, a connu un terrible coup de bambou après Bonneval. Et c’est l’inévitable Baptiste Chassagne, seulement 7e après 47 km, qui est venu s’inviter sur la boite grâce à une tactique de course appliquée à la lettre. « J’ai cru en moi et j’ai couru avec mes forces, constatait le volubile athlète du Jogging Club Verrane, sacré champion de France en 2023. Je prépare des épreuves qui durent 20 heures et j’ai couru comme un ultra-trailer : il ne faut jamais être dans la zone rouge, sinon, on n’en revient pas. Je suis hyper fier d’avoir défini une stratégie et de m’y être tenu, même quand ça a tangué. » Dans une course d’une grande densité, Robin Juillaguet (Esclops d’Azun), 4e en 8h00’41’’, et Mathieu Delpeuch (Sport Nat Pays Saint-Flour), 5e en 8h04’29’’, ne terminent pas très loin.
Place ce dimanche au trail court avec, de nouveau, l’Iseran au menu. Mais seulement une fois, ce qui devrait faire des heureux.