Actualités
Actualités
Stade / Compte-rendu
2 Août 2025 - Par Etienne Nappey
Mise à jour : 4 Août 2025 (11h52)
Photos : © P. Millereau - JM Hervio / KMSP
Partager
Tom Campagne a électrisé le stade Pierre-Paul Bernard de Talence ce samedi en remportant le concours de longueur avec 8,27 m, lors de la deuxième journée des championnats de France Elite. Gabriel Bordier a amélioré la meilleure performance mondiale de l’histoire sur 10 000 m marche, tandis que les demi-fondeurs Adèle Gay et Yanis Meziane ont fait mordre la poussière aux favoris Agathe Guillemot et Gabriel Tual.
Tom Campagne n’est pas de ceux qui annoncent en amont, plutôt du genre à fourbir ses armes dans l’ombre pour mieux prendre la lumière quand vient son heure. Après des mois de combat contre les pépins physiques, son moment est arrivé un peu avant la tombée de la nuit en Gironde. Son saut à 8,27 m (son quatrième), dans une ambiance électrique, a donné des frissons à la tribune bien remplie du stade de Talence, dans une finale de la longueur qui tardait à décoller vraiment. Le discret Campagne a levé les bras au ciel, poings serrés, hurlant sa joie avant d’aller étreindre son coach, Joffrey Baune. « Tout s’est passé très vite. Sur le coup, je me suis juste dit que j’allais aller à Tokyo, c’est un truc de fou. » Le calcul était bon, puisqu’il avait dépassé les 8,22 m requis pour être du déplacement au Japon, et aucun de ses concurrents n’a réussi à le dépasser par la suite.
Tout n’avait pourtant pas très bien commencé pour l’étudiant en ingénierie à l’université de Louvain, en Belgique. Un premier essai qui fait hésiter le jury, finalement invalidé, et un deuxième mordu, et il se retrouvait dos au mur. « Je n’étais pas plus stressé que ça, balayait le sauteur du Stade Bordelais. Je prends les sauts un par un, on règle les marques et voilà. » Avec 8,15 m à ce moment-là, Campagne avait déjà amélioré son record, avant de parachever le travail quelques minutes plus tard.
Talence 2025 : Tom Campagne avec 8,27 m à la longueur🚨 Minima pour les Mondiaux de Tokyo ! 🥇 Tom Campagne (Stade Bordelais) conserve son titre Elite avec 8,27 m (+0.7), son record ! 🔥 Quatrième meilleur performeur français de l'histoire ! 💻 Suivez les #CFAthlé en DIRECT sur www.athletv.fr et @lachainelequipe.
Publiée par FFA - Fédération Française d'Athlétisme sur Samedi 2 août 2025
S’il paraissait si serein, c’est sans doute parce que le jeune homme de 24 ans (il aura 25 ans fin novembre) est passé par des épreuves bien plus difficiles ces derniers mois. Après des Jeux olympiques perturbés par une tendinopathie au long adducteur gauche, qui l’a poussé à se faire opérer en septembre 2024, il a enchaîné les pépins. « J’ai aussi eu une déchirure à l’ischio en avril. Au total, c’est ma quatrième compétition en onze mois », décomptait-il. Soulagé, Campagne a gardé en mémoire les « moments durs », et « l’adaptation constante » qui a été le maître mot de sa convalescence et de sa préparation. « Pendant 7-8 mois, je me suis battu tous les jours contre les problèmes dans ma tête et dans mon corps. Pendant tout ce temps, il n’y a pas une seule séance qu’on a pu faire normalement, il y avait toujours un pépin », posait-il.
Désormais relancé sur le chemin de sa progression, Tom Campagne est convaincu que sa performance n’est « que le début d’une nouvelle dynamique qu’on est en train de construire ». Neuvième des bilans mondiaux, il entend mettre à profit les six semaines qui le sépare du Soleil levant pour peaufiner sa forme et ses réglages. « Me qualifier pour les Mondiaux, c’est top mais ce n’est pas juste ça. J’ai clairement envie d’entrer en finale et de voir ce que je peux faire. Tout me semble possible. »
Deuxième ce samedi, Jules Pommery (Athletic Clubs 92) a bondi à 8,05 m à son ultime tentative pour faire main basse sur l’argent, tandis que Raihau Maiau (Amiens UC) a retrouvé ses jambes de gamin pour glaner le bronze (7,98 m), juste devant son coéquipier Erwan Konaté (7,92 m), tout frais champion d’Europe U23.
La dernière ligne droite du 10 000 m masculin a été aussi intense, ce samedi soir à Talence, que celle de la course féminine, la veille. Avec un public debout pour ovationner le vainqueur et des speakers en feu au micro. Mais le scénario, avant ce dénouement, a été diamétralement opposé. Après la lutte très serrée de la veille entre les favorites, Gabriel Bordier a réalisé un cavalier seul impressionnant, en faisant le trou dès les premiers mètres sur le reste du peloton et en prenant au moins un tour à l’ensemble des participants. « Un contre-la-montre », résumait-il en ces temps où le Tour de France occupe le haut de l’affiche.
Tout de suite sur des bases inférieures à la meilleure marque nationale de tous les temps de Yohann Diniz (38’08’’13 en 2014), le marcheur de l’US Saint-Berthevin n’a fait qu’accélérer l’allure, l’œil rivé sur le chronomètre à chaque passage de la ligne. « Je suis parti assez vite, puis j’ai laissé tomber la montre et j’ai fini aux sensations, retraçait-il devant un parterre de journalistes impressionnés, quelques minutes après l’arrivée. C’est là que j’ai été le mieux car j’ai déroulé, j’étais bien techniquement et physiquement. »
Les derniers tours ont été un récital et, après avoir rattrapé l’allure de la meilleure performance européenne de l’histoire de l’Italien Massimo Stano (37’33’’03 en avril dernier), il s’est lancé à l’assaut de la meilleure performance mondiale de tous les temps du Japonais Eiki Takahashi (37’25’’21 en 2020). Pari réussi avec une victoire en 37’23’’99 pour l’élève de Gérard Lelièvre, qui confirme sa capacité à briller sur des distances s’apparentant presque à du sprint pour les spécialistes de la marche athlétique. « Le 10 000 m n’est pas beaucoup disputé. L’objectif, ce sont les grands championnats. On retient les médailles à la fin de l’année, les chronos sont plus anecdotiques, reconnaissait de bon cœur le docteur en médecine de l’université d’Angers. Mais ça fait toujours plaisir, ça permet de se rassurer et de montrer qu’on est en forme. »
Reste qu’avec une performance de cet acabit, l’athlète de 27 ans a le potentiel pour continuer à abaisser son chrono de référence sur 20 km, à savoir ses 1h18’23’’ réalisés lors de sa troisième place à Podebrady (République Tchèque) lors des championnats d’Europe par équipes de marche. Désormais devant toutes les pointures de la marche mondiale au bilan du 10 000 m, Gabriel Bordier aimerait, dans un futur proche, réussir à les accrocher sur la distance reine, lors des grands championnats. Pourquoi pas dès Tokyo.
J’ai demandé 4,77 m car j’en ai marre de 4,76 m, j’ai trop de tentatives à cette hauteur.
A force de s’attaquer à une barre un centimètre au-dessus du record de France, qu’elle a égalée en mars dernier lors de son divin titre mondial indoor avec 4,75 m, Marie-Julie Bonnin a eu envie de varier les plaisirs. Et, après s’être assurée de conserver sa couronne en effaçant 4,63 m au premier essai pour poursuivre son sans-faute (4,27 m, 4,47 m et 4,55 m franchis sans trembler), la perchiste du Stade Bordelais a demandé aux juges de placer la barre à 4,77 m. Elle a échoué trois fois à cette hauteur, mais l’essentiel n’était pas là pour la protégée de Damiel Dossevi, qui a pu compter, presque à domicile, sur le soutien des nombreux spectateurs massés le long des pentes herbeuses surplombant le sautoir : « Je me suis vraiment rassurée car j’ai retrouvé des sauts que je sais faire et qui me permettront plus tard de sauter bien plus haut, savourait-elle avec un grand sourire. J’ai eu du mal à me régler en début de saison. J’ai tout de suite voulu partir sur de grosses perches, ce qui n’était pas le meilleur choix. J’accepte d’être désormais sur du un peu plus souple mais qui me renvoie. C’est rassurant dans la perspective des championnats. »
Qui a dit qu’on ne battait pas de record en championnats sur les courses de demi-fond ? Victorieuse du 1500 m au nez et à la barbe d’Agathe Guillemot (Haute Bretagne Athlétisme), qui lui a servi de « lièvre de luxe dans une course de rêve », Adèle Gay a effacé le très vieux record de France espoirs du 1500 m, en 4’04’’12. La récente vice-championne d’Europe U23 a ainsi effacé les 4’05’’78 de Florence Giolitti, qui datait du 19 août 1988, à Zurich. « J’avais l’or dans un coin de la tête, mais je ne m’attendais quand même pas à gagner », avouait l’Amiénoise. Partie sur des bases très élevées pour se « mettre dans l’inconfort et user ses adversaires », Agathe Guillemot, deuxième en 4’04’’49, avait la mine renfrognée de celle qui « perdait aux jeux de société contre mon frère quand j’étais gamine », mais pas de regret sur sa stratégie de course, dont elle tirera les bons enseignements.
La Bretonne n’est pas la seule favorite à avoir connu la défaite ce samedi à Talence. L’enfant chéri de l’US Talence, donné gagnant chez tous les bookmakers, a contrôlé la finale du 800 m jusqu’à soixante mètres de l’arrivée, avant de voir ses forces l’abandonner subitement. Yanis Meziane (Athlé 91) ne s’est pas privé pour saisir l’offrande, coupant la ligne en tête et en 1’45’’24, Corentin Le Clezio (EA Cergy Pontoise) et Jordan Terrasse (Clermont Auvergne Athlétisme) l’accompagnant sur le podium. « Hier, j’ai été disqualifié pendant deux heures (à la suite d'une bousculade un peu après le rabattage dans sa série, ndlr). J’ai dû attendre jusqu’à 23h30 au stade et, au final, le jury d’appel a fait en sorte de me remettre dans la course. La nuit a été un peu mouvementée, mais j’ai su me remobiliser », se remémorait le nouveau champion de France, tout heureux de prendre sa revanche sur la finale des France 2024, où il avait terminé au pied du podium, restant à quai dans la course aux Jeux de Paris 2024.
Avec trois tours à leur programme, les hurdlers font durer le plaisir à Talence. Pour le plus grand plaisir du public de Talence, puisque le 110 m haies est une des courses les plus attendues du rendez-vous national. Les séries ont donné un aperçu du grand spectacle attendu ce dimanche, avec le meilleur temps du jour pour Just Kwaou-Mathey. En 13’’10, le hurdler de l’Evreux AC a signé un chrono de classe mondiale, à un centième de son record personnel établi il y a deux ans, reléguant à plusieurs dixièmes Théo Pedre (SCUF), 2e en 13’’31, et Pascal Martinot-Lagarde (13’’57), qui sera bien au rendez-vous des demies pour son ultime championnat de France. « Je suis content, j’ai posé un truc bien dès les séries, appréciait, d’un ton apaisé, l’élève de Giscard Samba. Maintenant, il faudra répondre présent demain. Je veux vraiment gagner. En France, il y a des hurdlers de haut niveau, donc si je gagne, il y aura un chrono au bout. »
Il faudra en effet peut-être se rapprocher des 13’’, voire descendre sous la barrière mythique, pour venir à bout de Sasha Zhoya. Le triple champion de France en titre, capable d’élever son niveau jour J, n’est cependant pas encore à 100 % après une préparation perturbée par des douleurs au tendon d’Achille. Il l’a lui-même avoué à l’issue d’une série bouclée en 13’’35 malgré plusieurs fautes sur les obstacles, deux centièmes devant son camarade d’entraînement Erwann Cinna (Athlé 91) auteur d’un nouveau record personnel et quatre devant Romain Lecoeur (Stade Sottevillais). Avec également Aurel Manga (US Créteil) en 13’’26 (+1.6) et Wilhem Belocian (Lille Métropole Athlétisme) en 13’’31, tous les favoris seront dans les starting-blocks en demies. Avec en ligne de mire les Mondiaux de Tokyo, qu’ils ne seront que trois à rallier dans un peu plus d’un mois.
A court de compétition et en manques de repères, Makenson Gletty a profité de son passage sur « la terre des combinards », où il avait remporté le Décastar 2023, pour renouer les liens avec le très haut niveau. Avec ses 8258 points et un nouveau record sur 1500 m (4’25’’33), « Mak » a rempli sa jauge de confiance, qui s’était amenuisé pendant onze mois loin des stades, après une opération dans la foulée des Jeux de Paris. « J’ai kiffé mon 1500 m, c’était mythique ! Et je n’ai pas l’habitude de dire ça, j’ai vraiment ressenti beaucoup d’émotions », souriait le toujours posé Niçois. Dans sa foulée, Maxime Moitié-Charnois (Entente Pays de Fayence) est passé de l’autre côté de la barrière des 8000 points, et de loin (8156 points), en battant six de ses dix records, pour prendre sa revanche sur un Euro U23 raté.
A l’inverse, Alexe Déau sort d’un mois intense après sa médaille de bronze à l’Euro U23 sur le tour de piste. Cela n’a pas empêché la sprinteuse de l’ASA Maisons-Alfort de conquérir une première couronne nationale sur 400 m en 51’’49, après avoir débordé la tenante du titre Amandine Brossier dans la dernière ligne droite. Ryan Zézé (Stade Bordelais) n’a pas eu à s’employer outre-mesure pour triompher sur le demi-tour de piste, son virage express lui ayant largement facilité le travail (20’’47). A l’inverse, Hélène Parisot (Athlé Vosges EC) a « raté [son] départ » et a dû cravacher pour empocher la mise en 11’’28 sur 100 m. Régulière tout au long de ses trois courses du week-end sur 100 m haies, Sacha Alessandrini a signé un chrono de 12’’87 pour s’imposer devant Laeticia Bapté (US Robert) en finale. Nicolas-Marie Daru (AL Echirolles) est sorti du bois à la dernière minute pour conserver sa couronne du 3000 m steeple en 8’22’’94, tandis qu’Aude Clavier (Amiens UC) a pris un peu plus d’élan sur le 5000 m féminin, qu’elle a remporté en 15’33’’32 au terme d’une bien longue dernière ligne droite.
Côté lancers, la performance du jour est venue de Felise Vahai Sosaia. Le natif de Willis-et-Futuna licencié au Club Athlétique Jules Garnier a expédié son javelot à 80,20 m au quatrième essai. Il n’avait plus lancé aussi loin depuis deux ans, handicapé par plusieurs blessures à la cheville, à l’épaule puis au dos. Au marteau, Yann Chaussinand (Clermont Auvergne Athlétisme) a décroché son troisième titre consécutif sans trembler, avec un meilleur jet à 77,50 m sur un plateau plutôt rugueux et alors qu’il est en pleine période de travail intense de musculation. La collection de Frédéric Dagée s’agrandit aussi, avec une huitième victoire aux France Elite en plein air grâce à un lancer à 19,44 m.
Dans les sauts, sensation au triple avec la première place d’Anne-Suzanna Fosther-Katta qui est retombée à 13,73 m (+0.8). Elle a devancé Ilionis Guillaume (Grand Paris Seine et Oise Athlétisme), perdue dans ses marques avec une meilleure performance à 13,47 m (+0.9) et qui court toujours après une première médaille d’or en plein air. Mine de rien, la triple sauteuse de l’ES Montgeron monte pour la troisième fois de suite sur la plus haute marche du podium. Enfin, Solène Gicquel (Stade Rennais) a été sacrée à la hauteur avec 1,86 m, son quatrième titre.