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Avril 2004


Corinne Raux : “ Je n’ai pensé qu’à cette course pendant un an ”

A 27 ans, Corinne Raux fut la grande révélation du marathon de Paris, le 4 avril dernier. 3e de l’épreuve en 2h29’19’’ (ce qui fait d’elle la 3e Française de tous les temps sur la distance), près de trois minutes en dessous des minima olympiques, la jeune femme a atteint le but qu’elle s’était fixé voilà un an. Une belle reconversion pour la championne du monde 2002 de… duathlon (course à pied et vélo), qui peut désormais rêver tout haut aux Jeux olympiques d’Athènes. Entretien.


Athle.com : Corinne Raux, avec du recul, quel regard portez-vous sur votre performance du marathon de Paris ?
Corinne Raux : Cela reste pour moi une performance fabuleuse. Mon objectif de l’année était d’atteindre les 2h32’, les minima olympiques. Avec Dominique Chauvelier, mon entraîneur qui m’a servi de lièvre, je suis partie sur les bases de 2h30’ pour me laisser de la marge. Mais nous sommes même allés à une allure plus rapide que prévue ! A l’arrivée, avec 2h29’19’’, j’étais si contente ! Cela m’assurait quasiment la qualification pour les Jeux d’Athènes. De plus, la barrière des 2h30’ sur marathon est quelque chose de fabuleux pour les femmes. Sans compter que je me suis retrouvée sur la troisième marche du podium, à Paris ! Un bilan parfait.

- Vous pensiez pouvoir réaliser 2h29’ ?
- Il n’était pas évident de pronostiquer quoi que ce soit. D’un côté, ce n’était que mon deuxième marathon. De l’autre, vu les séances que je réalisais à l’entraînement, et le caractère de battante avec lequel je me suis présentée au départ, je pouvais espérer quelque chose…

- Aujourd’hui, vous êtes redescendue sur terre ?
- Sur le coup, j’ai eu du mal à y croire. Puis, dans les jours qui suivent, on en vient peu à peu à réaliser. On revoit la course, chaque kilomètre, chaque passage intermédiaire.

- Vous voilà dans la peau d’une sélectionnée olympique en puissance…
- Je n’ai pas changé mes habitudes pour autant. Je garde les pieds sur terre. Je n’ai pas changé de casquette… Mais il est vrai que participer aux Jeux est un rêve de gosse. Les J.O., habituellement, on les voit à la télévision, avec des yeux grand ouverts. S’imaginer qu’on va pouvoir y participer est un sentiment grandiose.

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- Votre parcours pour en arriver là a pourtant été tortueux…
- En fait, j’ai touché à pas mal de disciplines avant de me concentrer sur le marathon. De la course en montagne, des raids, du duathlon (qui combine course et vélo), dont j’ai même été championne du monde en 2002 ! Mais j’avais commencé l’athlétisme assez tôt, en benjamine. J’ai pratiqué le demi-fond, le 800 m, jusqu’au jour où j’ai décidé de me consacrer à mes études de kinésithérapeute. Pendant trois années, entre 19 et 22 ans, je n’ai pratiquement pas couru. Un footing tous les quinze jours, histoire de me dire que je faisais du sport. J’ai retrouvé l’envie en accompagnant mon frère sur un raid en nature. J’ai repris la course petit à petit. Je me suis prise au jeu de vouloir revenir…

- La coupure n’avait pas été trop dure ?
- Quand j’ai repris, je courais le 10 km en 38’, je n’avais plus aucune condition physique. Si on m’avait que je serais en 33’ cinq ans plus tard, je ne l’aurais pas cru. Mais dès 2002, je devenais championne de France de course en montagne, et championne du monde de duathlon avec l’équipe de France, que je venais d’intégrer ! Cependant j’aimais vraiment l’endurance, et la course à pied était ma discipline de prédilection. J’avais participé à des épreuves de longue durée. Je me suis dit “ pourquoi pas le marathon ” ? Après tout, cela ne serait qu’un effort de trois heures, grand maximum, pensais-je. Je suis donc entrée en contact avec Dominique Chauvelier et avec le club de l’Endurance 72, connu pour la course sur route, car je voulais me lancer à fond dans cette aventure. Si j’avais des résultats en étant à 70% dans plusieurs disciplines, cela valait sans doute la peine de se consacrer à une seule épreuve à 100%…

- Jusqu’à tourner le dos au duathlon, dont vous étiez tout de même la meilleure mondiale ?
- Ce n’était pas une décision facile à prendre, c’est vrai. Mais ma discipline préférée restait la course à pied. Sans compter que le duathlon n’est pas une discipline olympique. Le marathon, si…

- Au passage, quelle est l’épreuve la plus exigeante physiquement : duathlon ou marathon ?
- Voyons… Ce sont deux efforts différents… Mais je dirais le duathlon, car je suis plus à l’aise en course à pied qu’en vélo.

- Aujourd’hui, vous exercez le métier de kinésithérapeute ?
- J’ai effectivement obtenu mon diplôme d’Etat après trois ans d’études, et j’ai commencé à travailler. En parallèle, je progressais en course à pied. La balance s’est inversée : je travaillais de moins en moins pour pouvoir m’entraîner de plus en plus. Jusqu’au jour où j’ai décidé de me consacrer totalement au sport. Comme je n’avais plus de revenus, que je ne pouvais plus assumer un loyer, je suis retournée vivre chez mes parents, où j’habite toujours.

- Vous voilà donc maintenant sur la route d’Athènes. Vous avez déjà élaboré un programme ?
- Je me suis tout d’abord accordé une semaine de récupération totale en thalassothérapie, puis une autre semaine d’oxygénation à la montagne, entre ballades et VTT. Et maintenant ? On va voir ! En fait, nous n’avons rien programmé avec Dominique Chauvelier. Pendant un an, je n’ai pensé qu’au 4 avril, jour du marathon de Paris. Je ne voyais pas plus loin. Même à l’arrivée, je ne savais pas quel jour se courrait le marathon olympique.

- Vous avez un objectif en tête pour les Jeux ?
- Je n’ai pas regardé les résultats des Jeux précédents pour savoir à quel niveau de performance se situait ce genre de course. Mais je sais que les conditions risquent d’être particulières : il fera chaud, et le parcours est paraît-il assez vallonné. Mais ça, cela devrait être un plus pour moi… Je ne sais pas quelle place je peux viser. Je me donnerai, de toute façon, à fond. Comme toujours.

- Vous allez vous retrouver en équipe de France avec des athlètes comme Muriel Hurtis ou Mehdi Baala, qui viennent d’un autre univers, celui de la piste, que vous n’avez jamais connu, ou presque…
- C’est vrai que je ne les ai jamais vus qu’à la télévision ou dans les chroniques de résultats sportifs. Mais ce sera sympa de les retrouver, de discuter ensemble. Me retrouver en équipe de France ? Je ne suis pas du genre à appréhender ce genre de situation. Je reste toujours zen…

 

Propos recueillis par Cyril Pocréaux pour Athle.com

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