Jordier est déchaîné

Thomas Jordier a fait preuve d’une belle maîtrise mardi matin en Bavière pour s’ouvrir les portes de la finale du 400 m, en portant son record à 45’’37. Yanis David à la longueur, Alexandra Tavernier au marteau ainsi que les steepleurs Louis Gilavert et Djilali Bedrani ont également obtenu leur billet pour la finale de leur épreuve.
Les qualifiés
Jordier avec autorité
On n’arrête plus Thomas Jordier. Après un premier record personnel en séries lundi, le spécialiste du 400 m a remis ça ce mardi matin à l’occasion des demi-finales. Même avec peu de sommeil la nuit dernière, l’Amiénois a refait le coup de la dernière ligne droite pour décrocher une nouvelle victoire, et deux nouveaux centièmes rabotés sur son chrono de référence (45’’37 désormais). Le voilà en finale européenne, le premier depuis dix ans sur le tour de piste masculin,
et la médaille de bronze de Yannick Fonsat à Helsinki en 2012. « Maintenant que je suis là, le but sera de grappiller des places. Une médaille me ferait le plus grand bien, même le bronze en 46’’0, je prends », lançait-il à sa sortie de l’anneau munichois. Si le Britannique Matthew Hudson-Smith, bronzé à Eugene, semble au-dessus du lot après son récital en demies (44’’99), les deux autres places sur la boîte semblent accessibles à tous les autres coureurs, et la décision pourrait se faire avec les
dents. Ça tombe
bien, Jordier a faim.
Yanis David du bon pied

A la longueur, après un mois et demi sans sauter, Yanis David avait des fourmis dans les jambes. Si elle n’a pas sauté aussi loin qu’à Caen lors des France Elite (6,80 m), date de sa dernière compétition le 25 juin dernier, la Guadeloupéenne du Monster Club Athlé a réalisé une belle série, en montant en puissance au fil des sauts. Ses performances : 6,44 m (-0.3), 6,51 m (-1.0) et 6,57 m (+0 .6). Un dernier bon synonyme de neuvième place des qualifications, dominées
par la favorite allemande Malaika Mihambo, visiblement bien remise du Covid-19 contracté il y a quelques jours. « C’est de bon augure pour jeudi, s’exclamait, pleine d’enthousiasme, la Française installée en Floride. Je veux aller encore plus loin en finale, et pourquoi pas battre mon record. Je n’aurai rien à perdre, je vais courir sur la piste comme je ne l’ai jamais fait. »
Tavernier sans trembler

Pour son premier grand championnat depuis les Jeux de Tokyo, où elle avait mal vécu sa quatrième place, Alexandra Tavernier « marchait sur des œufs, sans savoir où [elle] en était ». L’Annécienne s’est rapidement rassurée, en expédiant son marteau à 68,85 m au premier essai. Quatorze centimètres de plus au deuxième, et elle était sereinement qualifiée pour la finale, même sans avoir franchi la ligne de qualification directe. « J’étais crispée, ce qui
n’est jamais bon
au marteau, mais j’ai quand même assuré un jet à 69 m, avec l’expérience, donc la forme remonte bien. » La vice-championne d’Europe en titre, qui a vu la favorite polonaise Malwina Kopron envoyer ses trois jets dans la cage dans le concours B, attend désormais avec impatience une finale où la situation sera plus ouverte que jamais.
Gilavert vainc ses peurs

« J’ai du mal à aborder les championnats. Je suis toujours là à me tétaniser et à me crisper. Cette fois, je me suis dit avant la course : ‘’arrête, c’est bon, si tu continues comme ça, ça va se passer comme d’habitude. Le soir, tu vas te regarder dans la glace et te dire : mais qu’est-ce que tu as fait encore ?’’ » L’aveu, plein de franchise et de fraicheur, est signé Louis Gilavert. Le talent du demi-fondeur du Pays de Fontainebleau, notamment recordman
de France juniors,
a toujours été reconnu. Mais, pendant longtemps, il a perdu ses moyens en grands championnats, comme l’an dernier aux Jeux olympiques de Tokyo où il avait terminé très loin en séries. A 24 ans, l’élève de Thierry Choffin n’a plus de temps à perdre. Et s’il a connu une petite alerte à un tour de l’arrivée de sa série du 3000 m steeple, avec « un peu d’angoisse », il a su se remobiliser pour prendre la quatrième place, synonyme de qualification directe pour la finale, en 8’32’’26. « Aujourd’hui, je ne
vais pas
mentir, j’étais dans la facilité, savourait-il. J’ai pris beaucoup de plaisir et je suis satisfait. Je vais sortir (du stade) et juste voir des sourires. Et en finale, si les gars font l’erreur de m’attendre, moi, je ne les attendrai pas. »
Le vice-champion de France sera accompagné par Djilali Bedrani vendredi. Le fondeur du SATUC Toulouse Athlé « manquait un peu de rythme », selon ses propres mots. S’il n’a pas réussi à accrocher le groupe de tête, il a eu le mérite de s’accrocher au mental. Avec pour récompense une septième place en 8’35’’57, qui lui a offert le dernier billet qualificatif pour la finale. « Ca sera une autre course, promet l’athlète coaché par Sébastien Gamel. Ce seront les plus frais
qui vont réussir. J’ai déjà hâte d’y être pour essayer d’aller chercher que chose de beau. Ça va être ‘’ouf’’. »
Les éliminés
Amandine Brossier a mis tout ce qu’il fallait dans son 400 m, mais a « manqué de chance » puisqu’elle a manqué la qualification au temps de seulement quatre centièmes, alors qu’elle a battu son record personnel en 51’’21. L’Angevine, « très déçue », reconnaissait avoir manqué d’un peu de prise de risques dans la première partie de son tour de piste, alors qu’elle ambitionnait de courir « sous les 51’’ ». Gilles Biron n’est pas passé
loin non plus, puisqu’il a terminé
troisième de sa course, à seulement huit centièmes du Belge Dylan Borlée (45’’67 contre 45’’75). Le Martiniquais regrettait de ne pas avoir « relancé plus tôt, avant le passage aux 200 m », ce qui lui aurait peut-être permis de revenir sur ses adversaires avant la dernière ligne. « On ne saura jamais… », soufflait-il.

Aurore Fleury a connu un 1500 m compliqué. Partie aux avant-postes pour éviter les bousculades, la demi-fondeuse du Nancy Athlétisme Métropole a coincé dès que le rythme a accéléré, un peu après la mi-course. Elle a dû se contenter de la douzième place de sa série en 4’12’’48. « Je n’avais pas les jambes pour répondre aux attaques, constatait, très émue, la Tricolore. Ce n’est pas compréhensible, vu mes dernières semaines d’entraînement qui étaient vraiment
excellentes.
Et quand je vois le niveau devant, la qualification était largement à ma portée. C’est très décevant, et c’est dur à la fois pour moi et mon coach. » Sur 3000 m steeple, il n’y a pas eu de miracles pour Mehdi Belhadj, le meilleur Français de l’été (8’16’’35) sur le plan chronométrique, qui souffre d’une tendinite au genou depuis son stage terminal de préparation à Font-Romeu et n’a pu « courir que 2-3 fois en 17 jours ». Il termine dixième de sa série en 8’42’’38.
Au marteau, Rose Loga s’est « beaucoup amusée » pendant toute la durée de sa présence sur l’aire de lancer bavaroise, et se montrait satisfaite d’avoir retrouver des longueurs qu’elle n’avait plus connues depuis les championnats de France Elite, pas même à l’entraînement. La jeune spécialiste du marteau a vu son meilleur jet mesuré à 66,27 m, alors qu’il en aurait fallu 67,68 m pour entrer dans les douze meilleures invités à revenir mercredi.
Enfin, à la longueur, Maëlly Dalmat, en délicatesse avec ses marques, a mordu ses trois essais - le dernier d’un rien - et n’a pas été classée. « C’est une grosse déception mais j’apprends, relevait la sauteuse de l’Amiens UC. Il y aura des leçons à en tirer. »
Le coup dur
Quinion disqualifié

Alors qu’il visait ouvertement une médaille sur le 35 km marche, Aurélien Quinion a vu sa route s’arrêter brusquement à une douzaine de kilomètres de l’arrivée. Après une première partie de course où il a calé son rythme sur celui des poursuivants qui avaient choisi de laisser s’échapper l’Espagnol Miguel Angel Lopez et le Suédois Perseus Karlström, le Francilien a tenté d’accélérer la manœuvre après le dixième kilomètre. Trop rapidement sans doute, puisque cela
lui a valu un premier carton rouge. Revenu illico dans le groupe de chasse, il a écopé d’un deuxième carton peu de temps après. Après une dizaine de kilomètres plus calmes, lors desquels Karlström a baissé pavillon, usé, la menace s’est transformée en sanction lorsque Quinion a vu une troisième lumière rouge s’allumer à côté de son nom sur le tableau des pénalités, synonyme de 3’30’’ d’arrêt forcé. Il a ensuite tenté de reprendre son rythme, en neuvième position, pour s’offrir une place d’honneur,
mais il a été définitivement disqualifié aux alentours du 25e kilomètre, un quatrième juge ayant estimé que sa progression était irrégulière.
Thiery lancé dans sa remontée
Quinzième à l’issue de la première journée du décathlon, Baptiste Thiery a déjà grapillé quatre places et pointe désormais au onzième rang avec 6569 points. Après un 110 m haies en 15’’10 en deçà de ses attentes, le Martiniquais de la Jeunesse Sportive Franciscaine s’est ensuite repris avec un bon disque à 41,93 m. Avant de frapper fort, comme prévu, à la perche en effaçant une barre à 5,40 m au premier essai, lui qui possède un record à 5,70 m. Dans un classement
toujours dominé par le Suisse Simon Ehammer avec 7202 points, l’espoir français va tenter de se rapprocher d’une place de finaliste, pour l’instant située à 97 unités. Il lui reste le javelot et le 1500 m pour grimper encore dans la hiérarchie.
Florian Gaudin-Winer et Etienne Nappey pour athle.fr Photos : JM Hervio - P. Millereau / KMSP / FFA
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