Rayonnants !

Rénelle Lamote et le 4x400 m masculin (Gilles Biron, Loïc Prévot, Téo Andant, Thomas Jordier, avec Simon Boypa en séries) sont montés respectivement sur les deuxième et troisième marches du podium, à l’issue de courses spectaculaires. Avant de transmettre leur bonheur avec un enthousiasme communicatif. A la perche, Thibaut Collet (5,75 m) et Renaud Lavillenie (5,65 m) ont pris les cinquième et septième places.
Les médailles
Lamote, l’europhile
Elle ne s’arrête plus de parler et s’excuse presque : « Je suis un moulin à paroles ! » Visage radieux, Rénelle Lamote est euphorique en zone mixte, devant les journalistes. Elle n’est pas championne d’Europe. Mais sa deuxième place sur 800 m a presque un goût de victoire. Deuxième en 1’59’’49 derrière la favorite britannique Keely Hodgkinson, sacrée en 1’59’’04, elle décroche l’argent européen pour la troisième fois consécutive après Amsterdam en
2016 et Berlin en 2018. « Je suis contente d’être toujours dans le game et dans la course pour Paris 2024 à 28 ans, savoure-t-elle. Je suis allée chercher cette médaille d’une manière différente des précédentes. J’ai eu l’impression d’être actrice dans cette course. C’est le meilleur scénario et c’est encourageant pour la suite. »
A la place de la patronne dès le rabattage, deuxième à l’extérieur de l’Allemande Christina Hering qui avait choisi d’assumer le train - 58’’60 à la cloche - l’élève de Bruno Gajer a laissé filer les Britanniques Hodgkinson et Reekie un peu avant le 600 mètres. « J’aurais dû m’affoler, ça m’aurait permis de rester au contact. Je fais une erreur tactique », analyse-t-elle, perfectionniste. Après avoir débordé à son tour Hering
dans le dernier virage, elle abordait la dernière ligne droite en troisième position et dépassait aisément Reekie. Un gros finish qui lui permettait de garder une marge confortable sur la troisième, la Polonaise Anna Wielgosz (1’59’’87).
La plus europhile des coureuses de 800 m n’est pas lassée des médailles d’argent continentales, au contraire. « Je suis fière de moi, de m’être remobilisée après les Monde et d’y avoir cru quand, autour de moi, je voyais que ça doutait aussi. C’est énorme pour moi. » Reste désormais à s’écrire un destin au-delà des frontières continentales, son ambition. « J’aimerais bien pouvoir franchir le cap des Mondiaux. Je m’exprimerai l’année prochaine, c’est pas grave.
» Avant ça, elle a envie de (s)’amuser sur la fin de saison pour aller chercher (s)on record à Rovoreto (30 août), Bruxelles (2 septembre) ou Zurich (7 et 8 septembre).
Le début d’un rêve pour le 4x400 m

Gilles Biron, Loïc Prévot, Téo Andant et Thomas Jordier. Ils ont tous été au niveau de cette finale européenne du 4x400 m, acteurs d’une course spectaculaire. Médaillés de bronze en 2’59’’64, derrière la Grande-Bretagne (2’59’’35) et la Belgique (2’59’’49), ils ont réalisé le troisième meilleur temps de l’histoire de ce relais. En s’appuyant sur un collectif dense et sans faille, une qualité reflétée par leurs chronos individuels du jour ;
45’’88 pour Biron, 44’’21 pour Prévot, 44’’87 pour Andant, 44’’68 pour Jordier. Une homogénéité remarquée d’ailleurs par les frères Borlée, figures de la discipline, qui en ont fait le compliment aux Bleus.
Mais au-delà de sa densité, ce relais a quelque chose d’au moins aussi important : une âme. Cela se sent lorsque Thomas Jordier, logiquement émoussé par ses trois courses en individuel, regrette de ne pas avoir pu conclure le travail de ses coéquipiers par une première place. Jusqu’à ce que Loïc Prévot l’interrompe, pour rappeler que « tout ce qui a été fait a été réalisé en équipe ». Les noms de Djamel Boudebibah, l’entraîneur national du relais,
Simon Boypa, titulaire en série, sont mis en avant. Tout comme ceux des anciens, qui n’ont pas tous eu le bonheur de goûter à une médaille : Mame-Ibra Anne, Teddy Atine-Venel, Mamoudou-Elimane Hanne. « Ce relais méritait une médaille depuis longtemps, il était toujours placé mais jamais récompensé, rappelle Téo Andant. Enfin, on ramène quelque chose. »
Avec cette nouvelle génération et un Thomas Jordier qui, du haut de ses 28 ans, fait figure d’ancien, le 4x400 m tricolore a de beaux jours devant lui. « Ca va nous pousser pour les prochains grands championnats, Budapest en 2023 et surtout Paris en 2024. C’est vraiment l’objectif : aller décrocher le titre olympique dans deux ans », ose Andant. « Le début d’un rêve », comme le dit si joliment Loïc Prévot, avant de filer avec ses coéquipiers
au podium et d’aller fêter ce bronze au cours d’une nuit qui s’annonçait belle et longue.
Les finalistes
Collet et Lavillenie au cœur du jeu

Respectivement cinquième et septième de la finale de la perche, Thibaut Collet et Renaud Lavillenie ont abattu leurs cartes au plus fort de la partie, mais n’ont pas connu la réussite maximale dans leur entreprise. Dans un concours où les montées de barre sur le fil du rasoir ne permettaient pas le moindre coup de mou, le benjamin des deux a débuté sans trembler à 5,50 m avant de passer 5,65 m puis 5,75 m, à chaque fois à sa deuxième tentative. L’aîné,
pour sa part, a opté pour une entrée en matière à 5,65 m, réussie à l’expérience, avant de partir directement à l’assaut de la barre placée à 5,85 m. Tous les deux ont fait frissonner les nombreux Français présents dans les tribunes du virage, mais n’ont pas trouvé la bonne combinaison pour dominer cette hauteur, qui leur aurait offert une place sur le podium aux côtés de Mondo Duplantis, impérial jusqu’à 6,06 m, et de l’Allemand Bo Kanda Lita Baehre (5,85 m), qui a enchanté son public.
Pour ses premiers championnats d’Europe, le Grenoblois pouvait être « satisfait d’avoir intégré le top 5, qui était [son] objectif, et d’avoir été à la bagarre ». En plus de l’expérience, il a aussi pris des repères sur « les plus grosses perches que j’ai jamais utilisées », et avec lesquelles il se voit bien « au moins à 5,85 m » très prochainement. Et si ses deux sauts ratés l’ont privé d’une médaille, la frustration cohabitait avec la patience chez le perchiste de
23 ans : « Je suis un peu frustré, mais chaque chose en son temps. Ça n’est pas ma dernière sélection ni mon dernier championnat d’Europe, loin de là… » Son camarade d’entraînement à Clermont, lui, n’avait « aucun regret sur le choix de l’impasse », pensant que 5,75 m ne suffirait pas pour monter sur la boîte une cinquième fois aux Europe. Le recordman de France a « manqué de feeling, des petits détails » sur ses trois essais à 5,85 m, alors que ses sensations étaient « globalement pas si mal, au vu des conditions
». Déjà tourné vers 2023, Lavillenie ne pouvait s’empêcher de repenser aux « treize mois de galères » pour se remettre de sa blessure à la cheville contractée aux Jeux olympiques de Tokyo.
La qualifiée
Valette a fait le boulot

Unique Française à démarrer sa compétition samedi soir, puisque ses camarades Laeticia Bapté et Cyrena Samba-Mayela étaient exemptées de premier tour, Laura Valette n’a pas tremblé lors des séries du 100 m haies. Malgré un « coup de pression » à l’échauffement en voyant la concurrente italienne se blesser, et une piste détrempée par la pluie qui s’est abattue sur la Bavière toute la journée, la Nantaise n'a pas paniqué. En tête sur les premiers obstacles
après un départ efficace, elle a senti un peu ses ischios après la mi-course, mais a géré le reste du parcours pour prendre la deuxième place de sa course en 13’’30. « Il faudra aller vraiment beaucoup plus vite dimanche, mais je sais désormais ce que je dois rectifier pour y parvenir », pointait-elle une fois au sec.
Florian Gaudin-Winer et Etienne Nappey pour athle.fr Photos : JM Hervio - P. Millereau / KMSP / FFA
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