Collet si près des étoiles

Thibaut Collet a réalisé une finale de la perche somptueuse, en portant son record personnel à 5,90 m. Une hauteur franchie au premier essai, comme toutes les barres précédentes. Il termine cinquième d’un concours d’une densité exceptionnelle.
La perf'
La fierté de s’être sublimé
Ce fut un concours de rêve ou presque. Lors duquel Thibaut Collet a montré qu’il a l’étoffe d’un grand champion, en réalisant le plus beau concours de sa vie, le jour J. Ce samedi soir sur le sautoir surchauffé de Budapest, la barre grimpait et le perchiste de l’EA Grenoble 38, imperturbable, enchaînait les sauts limpides réussis. A 5,55 m et 5,75 m, l’entame était parfaite. A 5,85 m, trois centimètres de plus que son record, la barre tremblait un peu. Mais là
encore, le double champion de France en titre passait du premier coup. Il restait en tête, à égalité avec recordman du monde suédois Mondo Duplantis. Mais le Philippin Ernest Obiena, l’Australien Kurtis Marschall et l’Américain Chris Nilsen, qui se sauvait au troisième essai, étaient encore là.
Cinq centimètres plus haut, rebelote au premier essai pour Collet, qui pouvait exulter et commencer à y croire, comme tout le camp tricolore. Dans l’histoire des Mondiaux, il n’était arrivé que deux fois que 5,90 m ne suffisent pas à monter sur la boite, en 1997 à Athènes et l’an dernier à Eugene. Ce fut à nouveau le cas aujourd’hui, puisque tous les concurrents en lice, à l’exception du Français, effaçaient 5,95 m au premier essai.
Une densité dingue qui sonnait la fin des espoirs de l’athlète de 22 ans, magnifique cinquième, la victoire revenant à l’inévitable Duplantis avec 6,05 m devant Obiena (6,00 m, record continental), pendant que Marschall et Nilsen partageaient le bronze (5,95 m). Avec 5,90 m, Thibaut Collet grimpe au sixième rang des bilans tous temps hexagonaux. Un premier sommet avant l’Everest des six mètres, auquel il s’est attaqué sans succès lors de son ultime tentative. « Là-haut, il fait
un plus frais », souriait-il. En fin connaisseur de sa discipline et digne descendant d’une grande famille de perchistes, il pointait d’autres symboles ayant basculé après ses 5,90 m. : « Je bats le record en extérieur de la famille, puisque mon père (Philippe, qui est également son entraîneur avec Philippe d’Encausse, NDLR) avait fait 5,85 m (rires). Celui-là, je le coche. C’est aussi la meilleure perf’ en championnats du monde pour un Français en termes de hauteur, puisque Renaud avait
fait 5,89 m plusieurs fois. Un petit bisou à Renaud (rires). »
Au-delà des chiffres, Thibaut Collet, finaliste et donc désormais athlète prioritaire pour les Jeux olympiques de Paris, bascule dans une nouvelle dimension. Ce qu’il réalisait progressivement : « Je suis en train de mesurer ce que je viens de faire, confiait celui qui sautera à Berlin, Aix-la-Chapelle et Bruxelles au cours des prochaines semaines. C’est fou ! Je suis arrivé en étant quinzième mondial. Je repars cinquième avec 5,90 m. Je passe à pas
grand-chose d’une médaille. J’y ai cru. Il y a un petit goût amer de ne pas l’avoir autour du cou, mais quand je vois les mecs qui sont devant moi, la hiérarchie de l’année est respectée. J’ai essayé de mettre un peu un grain de sable dans tout ça, en montrant que la France était présente. C’est à la fois extraordinaire et un tout petit peu dur. Mais il y a plus de fierté qu’autre chose ce soir. C’est ma performance mais aussi celle d’un staff, d’une Fédération. »
La Temps Fort
Le 4x100 m bleu sixième et entre deux eaux

Ils n’ont pas grand-chose à regretter. Sixième de la finale en 38’’06, un chrono supérieur de huit centièmes à leur performance des séries, les relayeurs du 4x100 m visaient le podium. Ils ont pris tous les risques pour cela et l’ont un peu payé lors de la deuxième transmission entre Pablo Matéo et Ryan Zeze. C’est que, comme ils l’avaient prédit, il fallait faire tomber le record de France (37’’79) pour monter sur la boite, avec la victoire des Etats-Unis
(37’’38), loin devant l’Italie (37’’62) et la Jamaïque (37’’76).
« On a joué avec les armes du moment, tout ne s’est pas passé comme prévu, mais on repart sans regret, soulignait Meba-Mickael Zeze, rampe de lancement du quatuor. L’an prochain, on sera prêts. » Un discours relayé par Mouhamadou Fall, qui avait conclu le travail de ses coéquipiers : « Je suis partagé par ce résultat. Il fallait oser, on a répondu présents et on n’est pas largués, alors qu’en termes de vitesse individuelle, on est largement
en dessous des Américains et des Jamaïquains. Mais on a vu que le podium était accessible, regardez les Italiens. » Un bel exemple à suivre sur la route de Paris.
Le chiffre
4

Quatre sur cinq pour les relais tricolores. Les 4x400 m hommes et femmes rejoindront demain le 4x100 m masculin et le 4x400 m mixte dans le top 8, à condition d’aller jusqu’au bout de leur course. Une belle réussite pour les collectifs. Les garçons ont réalisé une remontée spectaculaire pour prendre la deuxième place de leur série en 3’00’’05, sur les talons des Jamaïcains (2’59’’82). Ludvy Vaillant et Loïc Prévot ont lancé l’équipe de France, qui était
sixième à mi-course. Puis David Sombé et Téo Andant, en fins tacticiens, ont su tous les deux trouver leur place dans le trafic avant de réaliser des dernières lignes droites de toute beauté.
« Je suis parti à l’arrière du troupeau, je ne voulais pas doubler en virage donc j’ai attendu la ligne droite pour revenir, retraçait le sprinter du Lille Métropole Athlétisme, David Sombé. Et après, il ne restait qu’à voir Téo finir le travail. » « David m’a donné le témoin dans de bonnes conditions, enchaînait Andant. Je suis resté collé aux autres, je ne voulais pas fournir un effort bête et je savais que le finish était mon point fort. Il
fallait être patient. Ça a payé, tous les mecs ont fait du bon travail, on sera plus libérés en finale. Objectif médaille ! »
Leurs homologues féminines ont, elles, vécu un sacré ascenseur émotionnel. Cinquièmes en 3’27’’50 d’une série dominée par la Jamaïque (3’22’’74), et éliminées dans un premier temps, Amandine Brossier, Louise Maraval, Sounkamba Sylla et Camille Seri ont finalement été repêchées pour avoir été gênées lors du troisième passage par les Nigérianes, qui ont été disqualifiées. « On est soulagées, soufflait Louise Maraval au téléphone, depuis
le stade d’échauffement. Il va maintenant falloir se reconcentrer pour demain. On n’a plus rien à perdre. Il y a une place à aller chercher. »
Florian Gaudin-Winer pour athle.fr Photos : S. Kempinaire - JM Hervio / KMSP / FFA
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