La sensation Ducos en finale
Sur la lancée de son record personnel en séries, Clément Ducos s’est qualifié brillamment en finale du 400 m haies en 47’’85, le deuxième temps des demies. Il est un candidat plus que crédible au podium olympique. Marie-Julie Bonnin a terminé onzième à la perche avec 4,60 m, la deuxième meilleure performance de sa carrière.
Le temps fort
Ducos à la table des grands
Attention, frissons ! Clément Ducos est le genre d’athlète qui aime faire le spectacle, sur la piste ou au micro. Avec son style à l’américaine, un brin effronté et diablement excitant. Le diplômé en leadership et communication de l’université du Tennessee en a offert une nouvelle démonstration ce mercredi soir en demi-finales du 400 m haies, sur la piste violette du Stade de France. Il avait tiré le gros lot, avec dans sa course le champion olympique en titre
Karsten
Warholm et le champion du monde 2022 Alison dos Santos. Deux monstres sacrés de la discipline qui auraient pu impressionner le Français de 23 ans, vierge de toute compétition en meeting Diamond League après une première partie de saison prometteuse mais stoppée début juin par une lésion aux ischio-jambiers. Mais ça n’est pas le genre de la maison. « Avec des gens qui vont aussi vite, je suis obligé de ne pas avoir peur », glissera-t-il d’ailleurs quelques minutes après l’arrivée.
Entre-temps, l’élève de Duane Ross, troisième sur 110 m haies aux Mondiaux de Séville en 1999, avait réalisé une course pleine d’aplomb. Avec un départ ultra rythmé sur la même cadence que le Norvégien, pourtant connu pour ses mises en action détonantes, un deuxième virage solide, puis une fin de course plus solide que celle du Brésilien, qui coinçait au couloir 9. Deuxième en 47’’85, dix-huit centièmes derrière Warholm et un dixième devant dos Santos,
il est en
finale olympique pour sa deuxième sélection en équipe de France seniors et son premier grand championnat. Malgré « un peu moins de jus qu’en séries », où il avait explosé son record en 47’’69. Dingue. « C’est un immense bonheur. C’est exceptionnel, je suis trop heureux. »
« L’athlé, c’est tout pour moi »
Deuxième temps des demi-finales, dans le même centième que l’Américain Rai Benjamin, le hurdler du Bordeaux Ec confirme qu’il est un candidat plus que crédible au podium olympique. Et ne s’interdit rien dans deux jours. « Pour le grand public, je suis peut-être une surprise, mais les fins limiers du 400 m haies me connaissent. En finale, s’il (Karsten Warholm) fait une faute, je suis juste là. Je ne vais rien lâcher. J’ai vraiment envie de
cette médaille. Je
pense qu’il n’y a personne qui a autant faim que moi Je vais vraiment tout faire, si je dois me péter, je me pète. L’athlé, c’est tout pour moi, je n’ai que ça. » Gourmand et espiègle, Clément Ducos, en plus d’une récompense, compte sur des spectateurs encore plus bouillants que lors des deux premiers tours. « Ils n’ont pas crié aussi fort qu’en séries. Si vous pouvez leur passer le message. » Sûr qu’il sera entendu.
Il n’y aura pas deux Français en finale du tour de piste avec obstacles, même si Wilfried Happio a tout tenté dans la dernière demi-finale. Parti sur des bases rapides, le sociétaire du Lille Métropole Athlétisme a un peu coincé dans la dernière ligne droite et termine troisième en 48’’66, derrière Rai Benjamin (47’’85) et le Jamaïcain Roshawn Clarke (48’’34). « Ce n’est pas le scénario auquel je m’attendais, c’est le sport, constatait l’athlète
coaché par Olivier Vallaeys
à l’Insep. J’ai mis la manière, je pense que ça s’est vu. Je me suis battu de A à Z et j’ai pris des risques. »
La décla
« En qualifications, j’étais vraiment crispée et stressée. Là, je me suis lâchée. C’était enfin la finale, le soir, ça s’est complètement aligné. Je me suis régalée avec ce public qui nous soutient tellement. »
Avec son énergie et son sourire quasi inébranlables, que la barre reste ou non sur les taquets, Marie-Julie Bonnin serait capable de réveiller une enceinte vide. Ce qui n’était bien sûr pas le cas, avec un Stade de France dont les près de 70 000 sièges étaient tous occupés. La Bordelaise, tout en peps, a effacé 4,40 m et 4,60 m au deuxième essai, la deuxième meilleure performance de sa carrière, avant de coincer à 4,70 m. Un résultat synonyme de onzième place,
alors
qu’il aurait fallu qu’elle franchisse cette dernière hauteur, correspondant à son record personnel, pour être finaliste. « Il y a un peu de frustration car je tente des choses et j’avais envie que ça fonctionne aujourd’hui, expliquait-elle. C’était le moment rêvé pour passer ou même faire plus. J’ai tenté de sauter avec une perche que je n’avais jamais touchée avant, je pense qu’elle va me renvoyer bien plus haut prochainement. »
Ninon Chapelle en est, elle, restée à 4,40 m, et termine au quatorzième rang. Un résultat dont elle se contentait, après un été particulier perturbé par un accident lors d’un stage au printemps. « J’ai donné le meilleur de moi-même. J’aurais aimé aller un peu plus haut ce soir, mais j’ai eu une saison compliquée. Ça révèle juste mon manque de réglages. C’est un peu frustrant car j’étais très en forme ce soir. J’ai d’ailleurs fait plutôt des bons sauts. Je suis
quand
même contente de la manière dont je me suis employée dans ce concours et il y a beaucoup de fierté. »
Le coup dur
Zhoya et les hurdlers éliminés
Discipline traditionnellement forte de l’athlétisme hexagonal, le 110 m haies a apporté trois médailles olympiques à l’équipe de France dans son histoire. Un compteur qui ne grimpera pas, puisqu’aucun Tricolore n’a réussi à intégrer le top 8. Le plus attendu d’entre eux était Sasha Zhoya, en manque de course cet été à cause d’un tendon d’Achille douloureux mais victorieux lors du meeting de Paris en 13’’15, record personnel égalé. Le hurdler du Clermont Auvergne
Athlétisme
a réalisé un départ plus saignant que d’habitude mais a tapé de nombreuses haies. Il s’est classé troisième en 13’’34 (-0,1), dans le même centième que le Sénégalais Louis-François Mendy et loin derrière le Jamaïcain Rasheed Broadbell (13’’21) et l’Américain Freddie Crittenden (13’’23), auteurs pourtant de chronos abordables. « A ce niveau-là, tu touches une barrière, c’est la fin, constatait, amer, le protégé de Ladji Doucouré. Je n’ai pas réalisé la fin de course que j’ai normalement
dans les jambes et je n’ai
pas montré la meilleure version que moi. Je suis ‘’yomb’’ (énervé, NDLR). »
Raphaël Mohamed et Wilhem Belocian nourrissaient moins de regrets. L’athlète du Racing Club de Mamoudzou, formé à Mayotte et installé au pôle de Poitiers, n’a pas démérité en terminant septième de sa demie en 13’’41 (+0,1), à quatorze centièmes de son record. « Je suis heureux mais aussi un peu déçu, la course était à ma portée », constatait-il à l’arrivée d’une course survolée par l’Américain Grant Holloway (12’’98) devant l’Espagnol Enrique
Llopis, le Jamaïcain Hansle
Parchment (13’’19) et le Japonais Rachid Muratake (13’’26) arrachant les deux billets qualificatifs au temps. « Je fais ma meilleure course de la compétition, mais il me manquait encore un petit quelque chose pour aller en finale. Je trouve que j’ai bien géré. J’ai maintenant vu comment ça se passait et j’espère que je serai prêt pour les prochaines compétitions. » Plus expérimenté, Wilhem Belocian, après une saison tronquée par les pépins physiques, a terminé huitième de sa demie en
13’’52 (+0,6). « Aux mois
de mai et juin, je ne savais même pas si je pourrais faire une saison. Je me suis exprimé comme je pouvais, avec mes armes. Le bilan est décevant, on s’attendait à mieux vu notre potentiel. On ne se décourage pas. On va beaucoup bosser pour ce podium. »
Et aussi
Pontvianne et Gogois aux portes de la finale
Crève-cœur pour les triple sauteurs tricolores, qui ont terminé à quelques grains de sable d’un ticket pour la finale. Jean-Marc Pontvianne, 13e des qualifications avec 16,79 m (vent nul) au deuxième essai, est le premier éliminé avec la même performance que le Cubain Lazaro Martinez et l’Italien Andy Diaz Hernandez, qui le devancent au bénéfice du deuxième meilleur essai et reviendront sur le sautoir dans deux jours. Ces deux autres essais mordus
ont coûté cher au Nîmois. « J’ai essayé de tout donner avec les moyens que j’avais, lâchait ce dernier. Malheureusement, ça ne passe pas aujourd’hui. Je pense que j’avais ma place, mais j’ai eu des petits pépins physiques la semaine dernière. Je me suis battu avec mes armes. » Thomas Gogois, 15e avec 16,77 m (+0,2) à sa troisième tentative, après avoit été gêné par des crampes au deuxième essai, refusait de se réfugier derrière cette explication : « Je n’ai pas d’excuse. Je n’ai pas su
être au rendez-vous. Je suis vraiment désolé pour tous les Français qui comptaient sur moi. Je vous promets qu’il y aura une revanche dans quatre ans. »
Pas de finale non plus sur 200 m pour Ryan Zézé, moins à l’aise dans le virage au couloir 3 que lors des repêchages et trop juste dans la ligne droite pour relancer. Septième en 20’’81 (-0,1), il a terminé à distance de l’Américain Kenneth Bednarek (20’’00) et le Dominicain Alexander Ogando (20’’09).
A Paris, Florian Gaudin-Winer pour athle.fr Photos : KMSP / FFA
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