Le premier Sommet de la course à pied, initié par la FFA et rassemblant divers acteurs du running (organisateurs, collectivités territoriales, clubs, équipementiers, annonceurs, professionnels de santé, startups, réseaux sociaux…), s’est tenu mercredi 25 mars à la Maison des Travaux Publics, à Paris. Une journée de débats de fond, de confrontations d’idées et de partage, qui permet de mieux cerner une discipline en plein développement, ce à quoi elle pourrait ressembler demain et quel rôle peuvent espérer y jouer les principaux protagonistes. C’est une petite révolution des mentalités et des pratiques qu’a initiée la FFA. Ce mercredi 25 mars restera sans doute à marquer d’une pierre blanche : pour la première fois, avec le Sommet de la Course à pied, les acteurs de la discipline se sont réunis en un même lieu pour échanger, partager et imaginer ce que peut devenir une pratique qui confère en France au phénomène de société. La Maison des Travaux Publics, tout près des Champs-Elysées, a ainsi accueilli quelque 200 personnes, dont une cinquantaine de journalistes et blogueurs, toutes impliquées à divers titres dans l’explosion de la course hors stade en France. Collectivités, clubs, marques, créateurs de nouvelles technologies, médecins, animateurs de réseaux sociaux, médias, organisateurs d’événements… Autant d’acteurs qui, s’ils cohabitent souvent dans la sphère du running, ne collaborent pas forcément – quand ils n’évoluent pas en concurrence frontale. S’appuyant sur l’Etude menée par l’agence SportLabGroup (co-organisateur du sommet) et Harris Interactive, qui met en lumière que la France compte plus de neuf millions de coureurs dont 5,7 millions de pratiquants réguliers, le sommet avait l’ambition de faire un état des lieux de la pratique, de voir « comment aborder ce qu’on peut considérer aujourd’hui comme un mouvement de société » dixit Gilles Dumas, co-président de SportLabGroup. Il fut, en premier lieu, l’occasion de revenir sur ce qui mit en émoi ces derniers jours une partie du landernau. En début de semaine, l’article d’un quotidien régional prêtait en effet à la FFA l’intention de « taxer les courses sur route » pour mieux les encadrer. « Le titre de l’article était volontairement provocateur, a rectifié Bernard Amsalem, président de la Fédération, en guise d’ouverture du Sommet. Taxer les courses sur route, la Fédération n’en a ni les pouvoirs, ni les moyens. Mais on ne peut pas empêcher la FFA d’être un acteur de la course à pied, qui reste d’ailleurs la seule discipline où n’importe qui peut organiser une course sans passer par la fédération, contrairement à ce qui se passe au cyclisme, au triathlon… N’oublions pas non plus que nous sommes dans le cadre d’une délégation de service public du Ministère à la FFA sur l’organisation des courses en France, et que nous nous devons d’assurer la sécurité des pratiquants. » Des propos repris en écho par Thierry Braillard, secrétaire d’Etat aux Sports, présent au Sommet. « Quand on parle de sport santé, la qualité de l’organisation est une obligation essentielle. Or certains pensent qu’il est possible de faire n’importe quoi quand ils mettent sur pied un événement. Le moment est venu pour nous de regarder de plus près pour que ne se fasse pas n’importe quoi. Ce qui ne signifie pas réglementer davantage : il existe déjà des règlements, veillons déjà à ce qu’ils soient bien appliqués. » CQFD. 
Le rôle des politiques publiques face à l’incroyable accroissement du nombre des pratiquants fut d’ailleurs un thème central de la première des six tables rondes*. Entre autres questions incontournables dans un avenir immédiat ? L’aménagement de l’espace urbain. « Pendant des décennies, le sport a été organisé par l’école, les municipalités, ou les clubs, pointait ainsi Jean-François Martins, adjoint à la maire de Paris en charge du sport et du tourisme. Aujourd’hui, beaucoup de sportifs pratiquent en individuels, et les gens veulent rester dans une pratique libre. Cela nous oblige, au-delà de trouver des intermédiaires pour être en lien avec ces publics, à repenser la gestion des équipements municipaux, à leur mise à disposition, mais aussi à des services tels que des chronos ou des ateliers fitness dans les parcs publics, ou à l’aménagement de l’espace public disponible qui doit être envisagé pour la pratique sportive, avec les coulées vertes par exemple. » Prise en charge expérimentale de la pratique santé par les mutuelles ou la Sécurité sociale, implication des clubs dans les organisations de courses et nécessité d’un retour sur leur investissement bénévole, mutations des médias traditionnels ou apparition de nouveaux supports pour mieux répondre à la demande en conseils, pratique minimaliste, développement de secteurs industriels dédiés à la course... Le Sommet aura été l’occasion de balayer des thèmes tous azimuts. Entre deux conférences, lors des pauses, les échanges informels permettent de partager les expériences, d’imaginer des nouveaux partenariats et développement, d’échanger les cartes de visites. Des intervenants aussi divers que Stéphane Diagana, Roselyne Bachelot (ancienne ministre de la Jeunesse et des Sports), Roland Krzentowski (médecin du sport), Yann le Moenner (directeur général d’Amaury Sport Organisation et organisateur du marathon de Paris) ou François Pesenti (directeur général de RMC Sport) se croisent dans les travées. « C’est un moment qui n’existait pas auparavant, qui est important car il permet à des entreprises comme la mienne de se faire connaître, estime Kevin Benito, l’un des responsables de Weezevent, société de gestion d’inscriptions en ligne. Ça participe à la mise en avant de la course à pied et de ses innovations. » Jean-Pierre Giorgi, blogueur et animateur du site ‘‘runreporterrun’’, jongle lui entre interviews, montage de vidéos et mise d’infos en ligne pendant toute la journée. Dans le milieu, la communauté des blogueurs prend de plus en plus d’importance et de poids, entre avis sur les courses ou sur les produits testés. « L’idée de base du Sommet est très bonne, c’était une première, et ça a le mérite d’exister », estimait-il en fin de journée. Benoît Ponton, jeune président du club de Marne-la-Vallée Athlétisme, avait lui fait le déplacement en tant qu’observateur attentif. Et tenait à rappeler que les clubs sont bien souvent à la base du mouvement, s’ils n’en bénéficient pas toujours directement. « N’oublions pas que les clubs, au moins autant que les entreprises ou les collectivités locales, sont des organisateurs d’événements et de courses. Ils sont eux aussi en recherche d’innovations pour leurs adhérents. Ils doivent prendre la parole ici, venir sur un sommet de ce genre, qui reste globalement très intéressant. Il est d’ailleurs important qu’il se tienne au moins une fois par an car c’est le seul endroit, plus que sur le Salon du running, où les institutionnels et les entreprises ont le temps de se voir et de discuter. » Rayon innovations, en l’occurrence, l’explosion des nouvelles technologies dans le milieu du running ou l’apparition récentes d’événement de masse iconoclastes furent aussi sujets à discussion. Applications pour mieux courir, rendez-vous spécifiques à la communauté des runners via les réseaux sociaux, tee-shirts connectés… Face à ce « marché où existe un potentiel de croissance à deux chiffres » estime Loïc Yviquel, co-président de SportLabGroup, Bernard Amsalem a émis un vœu : que toutes ces nouveautés aident aussi les clubs à mieux attirer, encadrer et aider les coureurs dans un cadre structuré. Le chantier, en l’état, est immense… Ce qui n’a pas empêché la FFA de distinguer, en clôture de l’événement, les meilleures innovations de l’année écoulée. The Mud Day Race, nouveau concept inspiré d’un parcours d’obstacles et développé par ASO, a ainsi été récompensé du titre d’événement de l’année 2014. Côté objet, c’est le tee-shirt Skins, gamme de vêtements de compression, qui a remporté la palme. Une remise de prix qui devrait à nouveau figurer au programme de la deuxième édition programmée en 2016. Cyril Pocréaux pour athle.fr * Quand les politiques publiques changent le sport / Les événements font leur révolution / Une réponse à la demande sociale de Sport Santé / Le coureur, entre surinformation et besoin de repères / Quelle évolution et quels enjeux pour l’industrie ? / Un laboratoire d’innovations technologiques. |