Pistard, routard, combinard, sauteur, lanceur, jeune, compétition, loisir, haut niveau, découverte, nature, ville. Autant de mots à combiner qui, au sein des près de deux mille clubs, font l’athlétisme en France. Parmi les rouages essentiels de chaque structure, l’entraîneur, quel que soit son profil, occupe une place à part. Athle.fr vous invite chaque mois à la rencontre de ces hommes et femmes de l’ombre. Rencontre avec Arnaud Dinielle, 42 ans, entraîneur à l’Entente Maritime Athlétique 62.

Il fut d’abord demi-fondeur touche-à-tout de bon niveau régional. Puis éducateur sportif, diplômes fédéraux et professionnels en poche. Et puis Jimmy Gressier apparut un matin. Arnaud Dinielle est un coach de terrain, heureux d’emmener des individus ou un groupe vers un objectif. Il accompagne depuis maintenant plus de cinq ans le champion d’Europe espoirs du 5000 m et du 10 000 m. Le coach évolue, mais pas l’homme.

Votre définition de l'entraîneur ?

C’est un éducateur avec des valeurs humaines. Son rôle est d’amener l’athlète à son meilleur niveau et de l’aider à se dépasser. L’entraîneur partage les bons moments, mais il doit être surtout présent dans les moments difficiles et savoir comment remotiver l’athlète. Je pense aussi qu’il doit être à l’écoute et être capable de se remettre en question.

Entraîneur à Boulogne-sur-Mer, c'est plus dur qu'ailleurs ?

Je n’ai jamais entraîné ailleurs qu’à Boulogne-sur-Mer, mais je pense qu’ici, ce n’est pas le plus facile. Il y a le climat : nous sommes dans une région assez pluvieuse avec beaucoup de vent, mais surtout, nous souffrons d’un gros manque d’installations. Ces dernières années, nous n’avions pas de structure pour nous entraîner, notamment pas de stade, pas de vestiaires et surtout pas de piste. Celle du stade de la Libération est en partie recouverte par les tribunes pour le football. Avec mon groupe, nous nous entraînons autour des berges très bien aménagées de la Liane, qui traverse Boulogne. Au printemps et pendant l’été, ça va. Mais l’automne et l’hiver, c’est très compliqué. Alors on s’adapte. Nous avons de belles forêts et certains clubs de la région, comme celui du Touquet, nous ouvrent leurs portes pour aller faire nos séances sur piste, mais il faut souvent faire plusieurs kilomètres. Ce n’est vraiment pas l’idéal et j’espère que ça va vite changer. J’ai bon espoir de trouver une solution avec Saint-Martin-de-Boulogne, qui vient d’inaugurer une nouvelle piste. Heureusement que j’ai un super groupe, hyper motivé et soudé.

Ce qui vous énerve et vous plaît le plus dans votre fonction ?

Ce qui m’énerve, ce sont les jeunes qui veulent des résultats tout de suite, alors qu’il faut passer par certaines étapes pour arriver à l’objectif final. Il y a aussi les athlètes qui ne suivent pas leur plan d’entraînement et qui décident de faire des compétitions non programmées sans avertir. Je suis considéré comme un gentil, mais il faut être correct. Enfin, il y a les personnes qui viennent interférer entre l’athlète et le coach, en critiquant les méthodes alors que les résultats sont là. Ce qui me plait, c’est de voir évoluer les athlètes et de les voir prendre du plaisir à l’entraînement et en compétition. J’aime aussi beaucoup échanger avec les autres coaches qui ont plus d’expérience que moi et qui la partagent. C’est important pour moi d’échanger, afin de toujours progresser. On se rencontre lors des grandes compétitions mais en stages. La FFA s’ouvre aux coachs personnels et c’est une bonne chose.

Vous êtes un coach "connecté" ou un entraîneur à l'’’ancienne" ?

Je suis plutôt un coach connecté, mon groupe est composé d’une majorité de jeunes donc j’utilise les réseaux sociaux pour communiquer. Je me suis aussi pas mal documenté grâce à internet, afin d’améliorer et diversifier mes séances. Bien sûr, il faut savoir en prendre et en laisser sur le web, on ne réinvente jamais rien car il y a des socles fondamentaux.

Votre plus beau souvenir ?

J’en ai plusieurs. Mais le plus fort, c’est le premier titre de champion d’Europe espoirs de cross de Jimmy (Gressier) en Slovaquie en 2017. Il ne partait pas favori et il a fait une magnifique course. C’était un moment exceptionnel car on ne s’y attendait pas. Jimmy, que j’avais découvert dans une course locale quatre ans auparavant, avec ses lacets à peine attachés, et qui aurait pu avoir un avenir dans le football, gagnait un titre international. Quelle fierté ! Dans ces moments-là, je suis assez émotif, et lui, ça le fait plutôt marrer.

Quelle est votre relation avec les athlètes ?

Je pense que pour avoir des résultats, il faut de la rigueur mais aussi une confiance mutuelle. Je suis très proche et très à l’écoute de mes athlètes, même en dehors des séances d’entraînement. Avec Jimmy, on a une relation encore plus particulière, on est très proches vu que je lui consacre un peu plus de temps, il fait en quelque sorte partie de la famille.

Avez-vous un modèle d'entraîneur, dans l’athlétisme ou dans un autre sport ?

Non, je n’ai pas de modèle d’entraîneur en particulier. En revanche, j’admire certains coaches qui s’ouvrent aux autres, partagent leur méthodologie sans l’imposer, et avec lesquels j’ai eu la chance de pouvoir échanger. Leurs conseils me sont précieux et me font avancer.

Trois mots pour définir votre groupe ?

Humilité. Envie. Rigueur.

Propos recueillis par Renaud Goude pour athle.fr