La FFA vous propose, jusqu’à la fin d’année, son top 10 des grands moments de la décennie 2010-2019. Pour commencer, retour sur l’incroyable victoire de Myriam Soumaré sur le demi-tour de piste lors des Europe en Espagne.

En dix ans, l’athlétisme français a eu droit à des records du monde, un titre olympique, des titres mondiaux. Mais rayon surprise, rien ne surpasse, peut-être, la victoire sur 200 m de Myriam Soumaré à Barcelone, lors des championnats d’Europe 2010. Cette année-là, il y a du bleu, blanc, rouge aux quatre coins du stade de Montjuïc. Les supporters tricolores sont présents en nombre dans les tribunes et vivent une semaine de rêve, tant les médailles s’accumulent avec des tauliers au sommet de leur art, tel Yohann Diniz, et une nouvelle génération en pleine ascension, incarnée par le triplé de Christophe Lemaitre en or sur 100 m, 200 m et 4x100 m. Les Bleus termineront d’ailleurs la compétition avec dix-huit récompenses, un record qui sera amélioré quatre ans plus tard à Zurich.

Ce n’est pas faire injure aux sprinteuses tricolores, brillantes sur 100 m avec l’argent de Véronique Mang et le bronze de Myriam Soumaré, que d’écrire que la finale du 200 m n’est pas la course la plus attendue pour faire grimper encore plus le compteur à médailles. Surtout que, ce samedi 31 juillet, la première nommée se fait disqualifier pour faux-départ. Reste donc Soumaré mais aussi Lina Jacques-Sébastien pour représenter les chances hexagonales. Au couloir 8, donc à l’aveugle, Myriam Soumaré s’appuie sur ses traditionnels points forts : un départ détonnant et un virage parfaitement manœuvré, comme en demi-finales. Elle se retrouve au coude-à-coude avec la Russe Aleksandra Fedeoriva. D’habitude, l’athlète de 23 ans licenciée à Pays de France Athlé 95 coince dans la ligne droite. Mais la voilà qui tient mètre après mètre. Sa foulée trotte-menu est toujours aussi fréquente et ne se dégrade pas. Elle est championne d’Europe en 22’’32, record personnel explosé de soixante-neuf centièmes.

La suite la fait entrer dans le cœur des Français : ses embrassades avec Barni, la mascotte de la compétition, ses roulades par terre, les jambes secouées en l’air, le podium sur lequel elle monte en dansant. Une euphorie au naturel. Dans les coursives du stade, les journalistes s’affolent, à la recherche de la moindre information pouvant enrichir le portrait de cette athlète que seuls les spécialistes connaissent. Ils découvrent une jeune femme atypique, allergique aux start-lists et qui ne connaît aucune de ses adversaires, assistante maternelle pour qui l’athlétisme est un passe-temps avant d’être une passion. C’est le début d’un malentendu qui perdurera longtemps, les médias retenant plus son profil de grande dormeuse que sa capacité à se dépasser à l’entraînement.

Comme après tout miracle, on cherche des explications rationnelles. A commencer par ce vent mesuré à +0,1m/s, alors que le stade de Montjuïc était balayé depuis le début de la soirée par de belles rafales. On se demande si le couloir 8 n’aurait pas bénéficié de la part d’Eole d’un traitement de faveur. Mais vous en connaissez beaucoup des vents qui choisissent leur couloir et s’arrêtent à ses frontières ? Nous, non. Et Myriam Soumaré, en montant sur la troisième marche du podium lors des Europe 2012 et 2014, et surtout en étant finaliste aux Jeux olympiques 2012 et en abaissant son meilleur chrono à 22’’11 en 2014, prouvera qu’elle était bien plus que l’athlète d’une seule course.

La rédaction