Entraîneur emblématique de l’AS Aix-les-Bains, et notamment de Christophe Lemaitre, Pierre Carraz est décédé dans la nuit du 30 au 31 décembre 2022, des suites d’un accident vasculaire cérébral, à l’âge de 82 ans.

On peut aimer le sprint et briller sur la durée. Figure historique de l’AS Aix-les-Bains, Pierre Carraz en était une des voix et un des visages les plus familiers depuis les années 50. Apprécié et reconnu bien au-delà des frontières de la Savoie, où il avait passé toute sa vie, le coach capable d’entraîner dans presque toutes les disciplines - « à l’exception du marteau et du demi-fond », de son propre aveu, avait dédié une bonne partie de son existence à l’athlétisme et à la formation de jeunes sportifs. De sa voix forte et avec poigne, il savait les mener vers des performances de choix sur le tartan tout en veillant à leur épanouissement personnel, ses valeurs humanistes chevillées au chrono pendant autour de son cou.
Le plus célèbre d’entre eux, Christophe Lemaitre, a réagi à l’annonce de son décès dans les colonnes de nos confrères du Dauphiné Libéré. « C’est grâce à lui si j’ai ce palmarès. Un jour, il avait déclaré qu’avec le talent que j’avais, n’importe quel coach aurait pu faire l’affaire. Moi, je ne pense pas. Il était passionné, il avait l’œil et l’expérience pour faire progresser. » Médaillé olympique sur 200 m en 2016, quadruple champion d’Europe, Lemaitre a passé l’essentiel de sa carrière sous les ordres de celui qui l’avait guidé depuis l’âge de seize ans jusqu’au plus haut niveau international.

La transmission comme religion

Comme tant d’autres, parmi lesquels la combinarde Chantal Beaugeant, le sauteur en hauteur Grégory Gabella et le sprinter Pierre-Alexis Pessonneaux, Lemaitre a écumé la piste en herbe de Marlioz, à Aix, où Pierre Carraz officiait depuis plus de soixante ans. Jeune athlète prometteur, Carraz décroche une deuxième place aux championnats de France sur 110 m haies, puis un titre national au pentathlon, après avoir signé sa première licence au sein de son club de toujours en 1955, à quinze ans. Mais très vite, c’est vers l’entraînement qu’il se tourne, donnant un coup de main à l’école d’athlétisme alors qu’il n’est pas encore majeur. En parallèle de son professorat d’EPS, le Savoyard donne de son temps sans compter à l’ASA, club familial s’il en est. Ses méthodes, qu’il qualifiait volontiers d’« à l’ancienne » étaient sans cesse remises en question pour se renouveler, et avaient pour valeurs cardinales la fidélité, l’intransigeance et le bénévolat. Elles faisaient de lui un meneur d’hommes et de femmes hors pair.
Ces dernières années, Pierre Carraz avait fait le choix de prendre un peu de recul avec le haut niveau pour ménager sa santé, et retrouver l’ombre qu’il préférait, de loin, à la lumière. Tout en continuant à veiller d’un oeil sur  préparation de Lemaitre, et en s’occupant des jeunes pousses aixoises. Ils sont aujourd’hui des centaines, de toutes les générations, à constater le vide et l’empreinte indélébile laissés par « Pierrot ».

A sa famille et à ses proches, la Fédération Française d’Athlétisme présente ses plus sincères condoléances.