Reconnu au niveau international depuis 2001, le décathlon féminin fera son apparition dans le cadre de l’Open de France les 22 et 23 juillet à Évry-Bondoufle. Parmi les douze athlètes en lice, l’Américaine Jordan Gray fera figure de grande favorite. Présentation avec Adeline Audigier, décathlonienne et coorganisatrice de l’épreuve. « Les filles peuvent faire du déca, c’est une épreuve officielle. À Bondoufle, on veut montrer que le décathlon féminin existe ! » À quelques jours de l’Open de France d’athlétisme, Adeline Audigier est plus que jamais dans les starting-blocks. En tant que participante, déjà, puisqu’elle prendra part à ce premier décathlon féminin officiel organisé au niveau national, qui prend la suite des pionnières de Val-de-Reuil dans les années 90 et Aurillac au début des années 2000. Et aussi en tant qu’organisatrice, puisqu’elle couve cette compétition depuis bientôt un an. C’est en septembre 2022, lors du Décastar de Talence, qu’est née l’idée de relancer le décathlon féminin, à la suite d’une discussion avec André Giraud, président de la FFA, Jean-Marie Bellicini, secrétaire général de la fédération, et Marie Collonvillé, ancienne finaliste olympique et mondiale à l’heptathlon. « La voie a été ouverte en France à partir des années 2000, avec le premier record du monde établi par Marie à Talence en 2004 (8 150 points), rappelle Adeline Audigier, licenciée à la Sco Sainte-Marguerite
Marseille. L’année suivante, ce record a été amélioré par la Lituanienne Austra Skujyte (8 366 points), mais ensuite, il a fallu attendre plus de quinze ans pour qu’une autre fille s’en approche... » Cette fille, c’est Jordan Gray, l’heptathlonienne américaine (record à 5 903 points) qui, en 2021, a signé le deuxième score le plus élevé de l’histoire (8 246 points). Depuis quelques années, l’athlète de 28 ans a repris à son compte la cause du décathlon féminin avec le slogan « Let women decathlon! ». Alors, pour marquer le coup à l’occasion de l’Open de France, Adeline Audigier n’a pas hésité pas à la contacter directement. « J’ai proposé à Jordan de participer au décathlon de Bondoufle, et elle a accepté
! Puis une autre Américaine de niveau national, Jordyn Bruce, a demandé à venir. En France aussi, l’engouement a dépassé nos attentes. Au total, on a reçu vingt-cinq inscriptions pour seulement douze places. » Pour pouvoir s’inscrire, il fallait avoir terminé un heptathlon et franchi au moins 2,50 m à la perche. « La plupart des participantes viennent de l’hepta - les trois-quarts étaient aux championnats de France d’épreuves combinées à Compiègne -, mais on a aussi des athlètes polyvalentes spécialistes de la
perche ou du disque. Le déca, c’est hyper attrayant pour ce profil de filles qui aiment le challenge. » Une première de haut niveau Parmi les douze athlètes sélectionnées pour le déca féminin de Bondoufle, plusieurs sont déjà montées sur des podiums nationaux, comme Roseva Bidois (Saran Loiret Athletic Club), vice-championne de France espoirs au poids et au disque en 2022, et Anaik Previdi (Asa Maisons-Alfort), médaillée de bronze aux championnats de France nationaux à l’heptathlon en 2021. Pour elles, comme pour l’Allemande Patricia Mehlich (Sco Sainte-Marguerite), qui sera également de la partie, le défi est d’autant plus séduisant que
l’ordre des épreuves du décathlon féminin est le même que chez les hommes, avec une table de cotation comparable. De quoi susciter des vocations, comme l’espère Adeline Audigier ? « Ce qui se passera à Bondoufle va forcément créer un précédent. C’était incohérent que le déca féminin n’existe pas en compétition, hormis quelques meetings à Arles, Montreuil ou Talence. En Belgique et en Suisse, il y a des décathlons féminins chaque année, vers la fin septembre, pour permettre aux sept ou huit participantes de ne pas mettre en péril leur saison d’hepta, explique celle qui a établi son record à 6 255 points en juin dernier
lors du meeting Antoinette Nana-Djimou de Montreuil. Avec cet Open de France, on montre que la France prend en main le sujet, tout comme les États-Unis. La marche suivante, ce serait de pouvoir décerner un titre national, pourquoi pas l’année prochaine. On serait la première nation au monde à le faire. Ça aurait du sens au pays de Marie Collonvillé et de Kevin Mayer, tous deux détenteurs du record du monde du déca… » Et si la mayonnaise prend dans les autres pays, il conviendra peut-être, un jour, d’inscrire
le décathlon féminin au programme des grands championnats. C’est en effet la dernière épreuve d’athlétisme que les femmes ne peuvent pas disputer comme les hommes au niveau international…
Camille Vandendriessche pour athle.fr |