André Giraud : « Nous avons su nous adapter » | ||||
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![]() André Giraud, qui quittera ses fonctions de président de la Fédération Française d’Athlétisme le 14 décembre prochain, dresse le bilan de son action, entre réussites et axes d’amélioration. L’adaptation aura été le maitre-mot d’un deuxième mandat marqué par de nombreux défis et un contexte inédit. Après huit ans à la tête de la Fédération, quelle réussite de votre deuxième mandat souhaitez-vous mettre en avant ? Mon premier mandat a été celui de l’apprentissage. J’ai pris conscience que, pour mener à bien notre mission, il nous fallait être plus proches encore de nos structures, notamment locales. Le second a été loin d’être ordinaire, puisqu’il a été marqué par la crise sanitaire qui a bouleversé nos vies et perturbé nos projets, notamment en début d'olympiade. Malgré ces obstacles, je suis particulièrement fier de la manière dont nous avons traversé cette période, unis et solidaires au sein de la grande famille de l'athlétisme. Les clubs, qui étaient en première ligne, ont su répondre présents malgré la fermeture des stades. Nous avons déployé des dispositifs fédéraux adaptés, qui nous ont permis de maintenir une activité, même dans un contexte extrêmement compliqué. Le Covid-19 a eu un impact très fort sur notre nombre de licenciés, avec une baisse de 16 % pendant la saison 2020-2021. Mais dès la rentrée suivante, nous avons enregistré un rebond spectaculaire, notamment chez les plus jeunes (éveil athlé, poussins, benjamins). Ce regain d’intérêt est le fruit de notre résilience collective, mais aussi d’un plan d’investissement et d’accompagnement des territoires que nous avons lancé en 2022. Ce plan a permis à l’athlétisme de se réinventer et de continuer à se développer. Comment ce plan s’est-il concrétisé sur le terrain ? Il faut d’abord rappeler qu’il a été mis en place grâce à un temps démocratique important. Lors de l'Assemblée générale 2022, les délégués des clubs ont voté une augmentation du prix de la licence de six euros, une décision courageuse qui nous a donné les moyens d’agir. Cela n’a pas été facile, mais nous avons su expliquer pourquoi cette mesure était nécessaire pour réaliser nos ambitions. Cette pédagogie est essentielle et doit se poursuivre. Trois axes prioritaires ont été définis : la transformation et la modernisation de l’athlétisme, l’amélioration des services aux adhérents et aux structures, et le développement de la formation et de la professionnalisation. Sur le terrain, cela s’est concrétisé de plusieurs manières. Nous avons créé 24 postes de chargés de développement dans les ligues, ce qui a permis de renforcer notre présence locale. Nous avons aussi mis à la disposition des licenciés l’accès gratuit à Athlé TV, une plateforme qui diffuse en direct les meilleurs moments de l’athlétisme français. Cette ouverture a renforcé le lien entre les clubs et la Fédération. Nous allons également lancer très prochainement deux nouveaux sites internet fédéraux, l’un dédié au grand public et l’autre aux clubs, pour encore mieux répondre à leurs besoins. Tout cela s’inscrit dans une démarche globale d’agilité : nous avons su adapter nos priorités et redéfinir nos actions en fonction des besoins et des évolutions du contexte. Des regrets ou des déceptions ? Inévitablement, nous voyons à l’issue d’un mandat ce qui aurait pu être mieux, ce qui doit progresser. Le haut niveau est souvent la vitrine d’une fédération, et nos résultats aux Jeux olympiques de Paris n’ont pas atteint les attentes que nous nous étions fixées. Bien sûr, la médaille d’argent de Cyréna Samba-Mayela est une réussite magnifique, et nous devons également souligner les belles places de 4e et 5e obtenues par nos athlètes : Clément Ducos, Alice Finot, Rénelle Lamote et les relais 4x100 m et 4x400 m féminins… Nous espérions néanmoins des résultats plus alignés avec l’immense engouement populaire et le succès organisationnel des Jeux, auxquels nos équipes ont largement contribué. Nous avons entrepris un travail approfondi pour analyser nos performances et identifier les leviers à actionner. La mise en place d’une cellule d’optimisation de la performance est l’un des outils qui doit permettre à la prochaine équipe de corriger le tir. Malheureusement, cette initiative est arrivée plus tardivement que prévu, mais elle constitue une avancée majeure pour mieux structurer notre approche de la haute performance. Une autre grande déception a été l'annulation des championnats d’Europe de Paris 2020, qui devaient lancer l’olympiade. Cet événement aurait permis de préparer nos athlètes et de structurer l’équipe de France en vue des Jeux à Paris. Cette annulation a été une grande frustration pour nous tous : athlètes, entraîneurs, public et bénévoles. Certains concepts ont toutefois été repris par le comité d’organisation de Paris 2024, comme les célébrations au Trocadéro ou le marathon pour tous. Aux côtés des Jeux, n'oublions pas les résultats très prometteurs obtenus lors des championnats d’Europe de Rome quelques semaines plus tôt, avec un esprit bleu retrouvé, dans la lignée des belles promesses entrevues lors des différents rendez-vous des équipes de France jeunes au cours des quatre dernières années. Sur le off-road également, saluons la moisson de nos spécialistes du trail, encore confirmée lors des Europe d’Annecy cet été ! Notre Fédération, qui a été pionnière dans l’accompagnement des trailers, est aujourd’hui un exemple dans le monde entier et nous ne pouvons que nous en féliciter. Le running est en pleine expansion, tant au niveau des résultats que de la pratique grand public. Comment la Fédération s’adapte-t-elle à cette nouvelle dynamique ? La FFA occupe progressivement une place centrale dans l’univers de la course à pied. Avec l’introduction du Parcours Prévention Santé, qui a remplacé le certificat médical en 2023-2024, le processus d’inscription aux courses a été simplifié, et nous avons établi un lien direct avec des millions de pratiquants. Cela nous permet non seulement de fédérer une communauté de coureurs, mais aussi de revendiquer pour cette pratique, souvent autonome, l’importance du club pour progresser et être mieux accompagné, en toute sécurité. Nous avons beaucoup travaillé pour améliorer l’offre proposée par les clubs et la FFA continuera à le faire dans les années à venir. Les Jeux olympiques ont souvent été présentés comme un accélérateur pour le développement des clubs. Est-ce que cela se vérifie ? Nous assistons actuellement à une rentrée historique, avec des chiffres de licenciés qui dépassent ceux de 2019, où nous avions atteint un pic à 317 000 licenciés. Ce succès est en partie dû à l’effet olympique, mais il résulte également de plusieurs années de travail mené par la Fédération et ses clubs. Nous avons fait en sorte que les clubs soient prêts à accueillir ce nouveau public, et cela porte ses fruits. Dès le printemps dernier, nous avons mis à disposition des clubs une panoplie d’outils pour les aider à anticiper cette rentrée post-olympique : webinaires, conseils personnalisés, fiches pratiques… Nous avons également enrichi notre offre de formation pour permettre aux clubs de mieux répondre aux attentes des nouveaux adhérents, qu’ils soient compétiteurs ou amateurs. Comment la Fédération peut-elle encore renforcer sa proximité avec les clubs ? Une fédération nationale doit savoir répondre à toutes les attentes de ses 2 500 clubs. C’est difficile et exigeant. Je crois que nous avons fait de grands progrès durant cette olympiade. Nous avons mis en place une gouvernance qui encourage le débat et l’échange, notamment grâce aux commissions techniques qui permettent à chacun d’apporter sa contribution. Nous avons aussi créé un service dédié à la relation avec les clubs, et renforcé nos liens avec les territoires à travers le Conseil national de développement des ligues et des territoires. Nous devons continuer dans cette voie, en écoutant attentivement les besoins spécifiques des clubs, tout en leur proposant des solutions adaptées. Il faudra aussi accompagner encore plus finement les clubs en fonction de leur profil et de leur projet, car les pratiques sportives évoluent rapidement. Vous parlez souvent d’inclusion. Comment cela se traduit-il dans l’action de la Fédération ? Aujourd’hui, le sport ne se résume plus à la simple activité physique. Il est devenu un vecteur d’insertion sociale, d’éducation, et d’engagement citoyen. C’est une demande des pratiquants, des collectivités, des partenaires, de la société tout entière. Pour y répondre, nous avons créé une cellule dédiée à la performance sociale, afin de nous assurer que l’athlétisme réponde à ces nouveaux enjeux. Nous sommes présents dans les quartiers populaires avec des actions d’initiation à l’athlétisme, et nous avons lancé des initiatives comme le programme « Du stade vers l’emploi » pour favoriser l’insertion professionnelle par le sport. Le développement durable fait aussi partie intégrante de nos priorités. Nos événements patrimoines, comme le Meeting de Paris ou le MAIF Ekiden de Paris, intègrent désormais des initiatives visant à réduire leur empreinte écologique et à promouvoir une billetterie plus accessible. Ce sont des événements qui doivent non seulement être performants sportivement, mais aussi sur les plans social et environnemental. Quels chantiers, n’ayant pas pu être menés à leur terme, considérez-vous comme prioritaires pour la prochaine équipe ? L’un des grands chantiers que nous avons entamé, et qui mérite d’être poursuivi, est celui de la réforme du format et de la structuration des compétitions. Cela concerne l’ensemble de nos pratiques, des clubs locaux aux grands événements nationaux. C’est un enjeu complexe, qui nécessite une large concertation entre tous les acteurs de l’athlétisme. Nous avons besoin de décisions collectives, fondées sur une vision partagée de l’avenir de notre sport. La demande des athlètes et des clubs évolue, tout comme les enjeux environnementaux, avec par exemple la nécessité de réduire la longueur des déplacements. La société change, et nous devons adapter nos compétitions à ces nouvelles réalités. C’est un chantier passionnant qui attend la prochaine équipe. Un autre domaine qui demande encore des efforts est celui du développement de notre organisme de formation. Si nous avons déjà accompli des progrès significatifs, il reste encore des améliorations à apporter pour mieux structurer l’offre de formation, tant pour les entraîneurs que pour les dirigeants de clubs. À titre personnel, quel regard portez-vous sur votre parcours après toutes ces années à la tête de la Fédération ? J’ai eu l’immense privilège de servir l’athlétisme tout au long de ma vie, d’abord comme président de club, puis à la tête d’un comité départemental, d’une ligue, et enfin comme vice-président de la Fédération avant d’en devenir le président. Malgré ce parcours associatif déjà bien ancré, je me suis rapidement rendu compte que les responsabilités à l’échelle nationale sont d’une toute autre ampleur. Ce fut un nouvel apprentissage, ces huit années ont été marquées par des défis inédits, entre crise sanitaire, Jeux olympiques, et transformation de la société. Nous avons su, collectivement, nous adapter et faire face à ces situations, ce qui constitue pour moi l'une de mes plus grandes satisfactions. Mon équipe et moi avons œuvré pour moderniser la Fédération, en simplifiant le processus décisionnel afin qu’elle soit plus réactive et plus agile. Cela dit, la gestion du changement, dans un contexte social souvent tendu, a été un défi immense. Elle a exigé patience et écoute, deux qualités que j’ai dû cultiver. Être Président d’une fédération sportive vous place sous les projecteurs, et il m’a fallu m’adapter à cette exposition médiatique pour protéger l’image de l’athlétisme. Ce que je retiens avant tout, c’est la richesse des rencontres que j’ai faites avec des hommes et des femmes venant de tous horizons. Cette diversité a été pour moi une source d’enrichissement incroyable. De quelle manière comptez-vous désormais poursuivre votre engagement pour l’athlétisme ? Je suis impliqué dans l'athlétisme depuis que j'ai 14 ans, et j'ai commencé à entraîner des jeunes à 17 ans. C’est un sport qui m’a accompagné toute ma vie, et mon engagement pour cette discipline restera intact, même si je n’exercerai plus de nouvelles responsabilités officielles. Je pense qu’il est important de savoir quand laisser la place à la génération suivante. Dans mon club, la SCO Sainte-Marguerite Marseille, nous avons déjà formé une nouvelle équipe de dirigeants, prêts à prendre le relais. Je vais fêter mes cinquante ans de licence l’année prochaine, et je serai heureux de voir de nouveaux visages apporter leur énergie et leurs idées pour faire grandir le club. Je resterai bien sûr disponible pour partager mon expérience et accompagner celles et ceux qui le souhaitent. C’est ainsi que je conçois l’engagement associatif : en transmettant le flambeau et en passant le témoin, pour reprendre une belle image de notre sport.
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