Triple championne de France du 60 m haies et deuxième meilleure performeuse française de tous les temps en 7’’82 (derrière Cyréna Samba-Mayela) depuis le meeting de Liévin, le 13 février, Laeticia Bapté réalise une saison en salle bluffante. Et à l’approche des France Elite de Miramas, la hurdleuse martiniquaise de l’US Robert n’a pas l’intention de ralentir dans sa course folle.

Vous enchaînez les records personnels cet hiver. Quel regard portez-vous sur votre première partie de saison, et notamment vos prestations lors des meetings de Paris et de Liévin ?

Elle n'est pas encore finie, mais je pense, sincèrement, que je réalise ma meilleure saison hivernale. On a effectué un stage à Ténérife (Espagne) début janvier, j'ai vu que mes jambes allaient vite, que j'étais en forme, et ça s'est concrétisé en compétition. A Paris, tout simplement je ne voulais personne devant moi, sur la ligne d’arrivée, chez moi. C’est cette rage et cette volonté de bien faire devant les Français qui m’ont amenée à abaisser encore mon chrono et à me donner à 100 % sur la piste. Je ne voulais pas rater mon départ comme lors du meeting de Metz. Je savais que là, je n’avais pas le droit à l’erreur. Surtout que dans les intervalles, ça allait vite. Alors j’ai effectué quelques réglages au niveau de mon départ, et je me suis concentrée sur ça. J’étais sûre que j’allais partir vite, donc j'ai laissé la machine parler et ça a bien fonctionné.

Et à Liévin, vous avez encore grappillé un centième sur votre record en série. Que vous a-t-il manqué en finale pour aller chercher la gagne, face au gratin mondial ?

Plus de concentration sur moi-même. En série, ça s’est bien passé, j’étais plus relâchée et détendue. En finale, il y avait un petit peu plus de questions car plus d'enjeu. Ça m’a amenée à commettre quelques fautes. Il suffit que je sois aussi détendue qu’en série, et normalement, il ne devrait pas y avoir de problème. Je travaille dessus, donc ça devrait aller.

Comment vous préparez-vous mentalement pour vous faire une place parmi les meilleures hurdleuses de la planète ?

C'est important d'avoir confiance en soi pour évoluer. Donc oui, j’ai bien ma place avec ces filles. Après tout, elles ont toutes ont réussi à perfer, alors pourquoi pas moi ? Concourir avec elles me challenge à aller les titiller. J'ai commencé à faire de la préparation mentale avant les Jeux. C'était vraiment sur le tard, donc ça n'a pas porté ses fruits en 2024. Mais je constate qu’en ce début d’année, j’ai franchi un cap et ça me permet d'évoluer au maximum de mon potentiel.

Comment expliquez-vous ce cap que vous avez passé ?

L’année 2024 m’a laissé un goût amer. J'avais choisi de reprendre mon cursus d’études en pharmacie, en parallèle du sport. Je n'ai pas ressenti la fatigue tout de suite, mais elle est venue en cours de saison. Les chronos ne descendaient pas. Ce n'était pas l'été que j'attendais, surtout que j’avais fait une superbe saison en 2023. J’aurais dû être en progression, et là, je stagnais en 12”96. Je n’ai pas réussi à passer en demi-finales aux Jeux olympiques, alors que j'en avais largement les capacités. A la reprise, je suis arrivée revancharde à l'entraînement. C’est ce qui a fait que, maintenant, j'ai la rage de vaincre et que je travaille fort. Ma façon d'aborder les compétitions a changé.

Comment allez-vous aborder vos prochaines compétitions ?

L’objectif, aux France Elite, est de continuer à mettre en place des choses. Je vais avoir encore une ou deux courses pour me roder avant les Europe et les Mondiaux. A Apeldoorn (Pays-Bas), je vais viser une place sur le podium. A Nankin (Chine), ce sera l’occasion de me mesurer aux principales têtes d’affiche et d’essayer encore de les challenger.

Propos recueillis par Mathis Dussaut-Hayard pour athle.fr