En participant à quatre meetings en salle en l’espace de onze jours, Mehdi Baala a, cet hiver, testé sa capacité à enchaîner les courses. Le bilan ? Plus que positif. Avec deux records de France, ceux du 1500 m (3’34’’71) et du mile (3’52’’51), et deux chronos de belle facture sur 1000 m (2’17’’29 et 2’18’’20). Le tout dans des courses très relevées à Stuttgart, Liévin puis Karlsruhe et, pour finir, Stockholm. De belles promesses avant les Championnats du monde de Berlin en août prochain. Epargné par les blessures et plus affûté que jamais, le demi-fondeur du Lille Métropole Athlétisme a confié à athle.com les enseignements qu’il tirait de sa saison indoor. Interview.

Athle.com : Mehdi, vous avez battu deux records de France cet hiver, ceux du mile et du 1500 m, et terminé deux fois deuxième d’un 1000 m derrière Abubaker Kaki. Quel bilan tirez-vous de votre saison indoor ?
Mehdi Baala : L’objectif de ma saison en salle, c’était surtout d’enchaîner quatre courses dans les plus gros meetings du monde, en me frottant aux tous meilleurs. A Karlsruhe et à Stockholm, j’ai retrouvé le Soudanais Abubaker Kaki, qui visait à chaque fois le record du monde du 1000 m. Et à Liévin, pour mon mile, il y avait du beau monde avec en particulier Bernard Lagat. Seul le 1500 m de Karlsruhe était un peu moins relevé. Je ne m’attendais pas à réaliser de telles performances lors de ces quatre compétitions. Je ne peux donc qu’être satisfait.

En quoi vos résultats vous ont-ils surpris ?
Je n’ai pas fait les séances spécifiques que j’aime faire d’habitude avant mes compétitions pour me mettre en confiance. En stage, j’ai surtout insisté sur le registre foncier. Je n’ai retouché à la piste que quatre semaines avant mon premier meeting. Et, au début, absolument pas sur mes allures de course. Avec Bouabdellah Tahri, on tournait par exemple des 500 m en 1’20. Avant ma rentrée à Stuttgart, je ne savais donc pas où j’en étais, je n’avais pas d’indications.

Comment expliquez-vous que la forme soit si vite arrivée?
Avant ma rentrée, j’ai quand même fait une ou deux grosses séances un peu plus rapides. L’objectif, c’était surtout de faire un bon mile à Liévin. Mais je me suis finalement rendu compte que j’allais tout de suite très vite. Moi, on a beau me dire que je suis bien, tant que ça ne s’est pas traduit à l’entraînement par de beaux chronos, je ne suis pas rassuré.

Avez-vous senti la fatigue monter au fil des compétitions ?
Ma dernière course, le 1000 m de Stockholm, n’était pas prévue au programme. Jean-Michel (Dirringer, son entraîneur) n’était pas trop pour. Moi, je voulais voir comment mon corps allait réagir. Et, finalement, il a plutôt bien répondu. Je sentais que j’avais couru trois jours avant. Il y avait aussi la fatigue due à l’état d’euphorie qui a suivi mon record de France du 1500 m. Après une belle performance, c’est dur de trouver le sommeil au soir de la course.  Mais, en Suède, je n’étais pas trop mal.

Ces quatre courses en onze jours vous seront utiles dans l’optique des Mondiaux de Berlin…
L’enchaînement de compétitions est effectivement axé sur la préparation des grands championnats. Même si les Jeux olympiques 2008 ne sont pas forcément la référence en la matière. Là-bas, j’ai surtout limité la casse. Il ne faut pas oublier que je n’ai repris qu’en février 2008 l’entraînement. Je savais en arrivant en Chine que je manquais de foncier et que je le payerais à un moment. A Pékin, la densité de coureurs et de performances était la plus importante que j’ai jamais connue en grand championnat.

Lors d’un championnat d’Europe en salle, le niveau est forcément moindre. Est-ce pour cela que vous avez décidé de faire l’impasse sur Turin 2009 ?
Je suis dans l’optique d’un objectif mondial. Je considère que ma progression passe par la confrontation avec les meilleurs mondiaux. Attention, je ne dis pas que le niveau des Europe indoor n’est pas intéressant. Il y a par exemple les Espagnols qui sont toujours forts en championnat. Mais, cet hiver, j’ai préféré participer à, comme je l’ai déjà dit, quatre des plus gros meetings en salle du monde.

Derrière vous et Bouabdellah Tahri, une nouvelle génération de demi-fondeurs est en train d’émerger. Elle sera d’ailleurs bien représentée en Italie avec Yohann Kowal sur 1500 m et Nouredine Smaïl sur 3000 m…
Les Europe en salle m’ont, il y a quelques années, servi de tremplin (ndlr : Mehdi Baala, pour sa première sélection en équipe de France A, avait pris la 3e place sur 1500 m lors des Championnats d’Europe de Gand, en 2000). C’est une super expérience pour un jeune. Il y a de la place pour aller chercher une médaille. J’étais à Liévin en spectateur le week-end dernier pour les Championnats de France Elite. J’ai vu un beau 1500 m. Les Français sont capables de faire de belles choses. Et je pense qu’on n’oublie jamais sa première sélection en équipe de France chez les seniors.

Après ce superbe hiver, comment va s’organiser la suite de votre saison ?
Je coupe quelques jours. La semaine prochaine, je pars à Tignes où je vais pouvoir me reposer en faisant notamment de la thalasso. Je ferai seulement un footing tous les deux jours. Je reprendrai vraiment l’entraînement à la mi-mars. Je pense repartir en stage en Algérie un peu plus tard et peut-être avant en France, du côté de Gap, en fonction des conditions climatiques.

Vous aurez 31 ans en août prochain. Sentez-vous que la récupération est plus difficile qu’il y a cinq ans ?
Franchement, je ne vois pas de différence. Musculairement parlant, je me sens même mieux. Avant, j’étais un peu fou-fou. Je rentrais à pas d’heure, je mangeais n’importe quoi. Aujourd’hui, j’ai une hygiène de vie qui correspond à celle d’un sportif de haut niveau. J’ai trouvé la bonne méthode avec, par exemple, beaucoup de massages. Espérons que ça dure !

Propos recueillis par Florian Gaudin-Winer pour athle.com

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