Dans la foulée des spécialistes des épreuves combinées, les perchistes français ont, eux aussi, choisi la destination Réunion pour préparer leur saison. De retour depuis quelques dizaines d’heures en France, ils ne regrettent pas leur choix. Reportage sur place.

Ils ont eu du flair. C’est indéniable. Avaient-ils consulté les astres ou les anciens pour savoir à l’avance que l’hiver serait rude dans l’Hexagone cette année ? Toujours est-il que Jean-Yves Cochand, l’entraîneur national des épreuves combinées, comme son homologue de la perche Gérald Baudouin, ont eu une riche idée en programmant un stage de préparation pour leurs ouailles sur l’île de la Réunion en ce début d’hiver.
Loin des tempêtes de neige, les « combinards » et les « percheux » ont en effet trouvé ce qu’ils cherchaient : chaleur et conditions d’entraînement. Au lendemain du départ des décathloniens et heptathloniennes le 6 décembre, ce sont donc les perchistes qui ont investi les installations athlétiques réunionnaises. Si les « combinées » s’étaient établies à Saint-Paul et Petite-Ile, la perche française a, quant à elle, choisi le stade de Champ-Fleuri à Saint-Denis pour s’entraîner du 7 au 21 décembre.
« Jean (Galfione) m’avait dit que les conditions étaient excellentes ici puisqu’il était venu se préparer dans l’île pour sa dernière saison. Cela m’a définitivement décidé à venir », explique Gérald Baudouin, torse-nu sur la pelouse de l’enceinte dionysienne alors que la nuit est déjà tombée.
L’idée d’effectuer ce stage d’hiver dans l’océan Indien,  plutôt qu’aux Etats-Unis par exemple comme l’an passé, remonte au mois d’août. Vanessa Boslak, la recordwoman de France (4,70 m),  est alors en vacances dans l’île où vivent son frère mais également quelques amis. « Elle a pris contact avec les responsables de la ligue. Ils ont fait en sorte ensuite que nous venions. »

Lavillenie à 6 m
Gilles Hubert, le président de la Ligue réunionnaise d’athlétisme, entraîneur de perche, ne pouvait en effet pas laisser passer cette chance de voir les Lavillenie, Mesnil et compagnie venir profiter de son sautoir. La LRA et la ville de Saint-Denis ont donc pris en charge l’hébergement des stagiaires dans un charmant petit hôtel du centre-ville, trouvé une salle de musculation adaptée aux athlètes de haut niveau… Et le tour était joué, le groupe s’engageant en contrepartie à se produire en public lors d’un entraînement festif organisé à l’occasion de l’inauguration des nouvelles installations du stade dionysien  (les tribunes, qui accueillent désormais les locaux de la Ligue, ont été refaites tout comme la piste). C’est ainsi que, le samedi 11 décembre, le stade Champ-Fleuri a été rebaptisé Marc-Nassau du nom de l’entraîneur de Jean Mayer, le premier athlète réunionnais sélectionné aux Jeux olympiques (sur 200 m à Montréal, 1976) et aujourd’hui CTS dans son île.
Renaud Lavillenie, le champion d’Europe, y a fait le show, piquant et piquant encore à la demande. « Il a dû sauter 50 fois », sourit Gilles Hubert, l’élastique d’entraînement ayant remplacé la traditionnelle barre. Un élastique placé à 6 m en cours de séance. Pour le plus grand plaisir des quelque 500 spectateurs et des jeunes pouces de la perche réunionnaise, acteurs eux-aussi de ce Festi’perche à la sauce créole. « On aurait pu appeler cela la perche sur un volcan », glisse avec malice Gilles Hubert. Un petit clin d’œil à l’éruption volcanique survenue pendant le stage… « Nous ne sommes pas montés la voir. Trop de route », souffle Gérald Baudouin. « Nous sommes là pour travailler. »

« Mieux que les Etats-Unis ou les Antilles »
Justement, Romain Mesnil est en bout de piste en cette soirée. Damiel Dossevi patiente dans son ombre. Vanessa Boslak, fraîchement réopérée, est aux soins. Pour une fois, le vent est légèrement défavorable. Mais qu’importe. «En quinze jours, c’est la première fois qu’il n’est pas dans le dos. Tout se passe vraiment bien. Il fait bon mais pas trop chaud car c’est souvent nuageux l’après-midi. Nous avons bien récupéré du voyage avec seulement trois heures de décalage horaire. Nous sommes bien logés à dix minutes du stade et super bien accueillis par les gens d’ici. En résumé, c’est mieux que les Etats-Unis ou les Antilles à cette période de l’année»,  commentent Romain Mesnil et Damiel Dossevi, une fois la séance terminée. Un défi au tennis-ballon les attend.

« C’est tout bénef »
Pendant ce temps, Georges Martin est toujours au bord du sautoir, près duquel il conseille les minots de l’île invités chaque soir à partager la fin de l’entraînement avec les champions. Les yeux pétillent. Ces jeunes progressent à grands pas, espérant prendre la foulée de Thomas Rivière, formé ici et désormais Dijonnais (5,05 m en junior en 2010), ou encore Robin Hubert, 4,50 m en cadets et parti à Clermont-Ferrand à la dernière rentrée.
Robin n’est autre que le fils de Gilles, le président de la Ligue, à qui revient le mot de la fin. « Ce stage, c’est tout bénef pour tout le monde. Pour les perchistes, qui trouvent de bonnes conditions. Pour nos jeunes, car il y a un réel partage avec le groupe. Et pour notre athlétisme en termes d’image, de communication. » A revivre donc. Dès l’hiver prochain, tous l’espèrent, dans l’océan Indien.

A Saint-Denis de la Réunion , Luc Bizouerne pour athle.com

Les stagiaires : Renaud Lavillenie, Romain Mesnil, Damiel Dossevi, Nicolas Guigon, Flavien Basson, Stevy Dume, Samuel Lauret, Vanessa Boslak, Marion Lotout, Alixe Guigon (ex Auvray)
L’encadrement : Gérald Baudouin, Georges Martin (entraîneurs), Mathieu Louvat (kinésithérapeute)