Gaëtan Bucki, 30 ans, est de retour. Le lanceur de poids du Lille Métropole Athlétisme a frappé un grand coup samedi, lors d’un meeting régional à Liévin, en expédiant son engin à 20,35 m dès sa première tentative. Une performance située à seulement sept petits centimètres du record de France en salle d’Yves Niaré et surtout synonyme de minima pour les championnats d’Europe en salle de Paris-Bercy (19,80 m). Après trois saisons compliquées, le colosse nordiste améliore son record personnel de trente-quatre centimètres. Et ce n’est peut-être qu’un début…

Athle.com : Gaëtan, comment avez-vous réagi samedi après votre jet à 20,35 m ?
Gaëtan Bucki : Ça n’a pas vraiment été une surprise. Avec ce que je réalisais à l’entraînement et après avoir effectué une bonne rentrée en septembre, je savais que je pouvais réaliser les minima. De là à lancer à 20,35 m, ça n’était peut-être pas prévu pour tout de suite. La première chose qui m’est passée par la tête après mon lancer, ça n’a pas été la performance en elle-même. J’ai d’abord repensé à tous les entraînements lors desquels j’en avais bavé,  comme les footings dans les bois, pas forcément adaptés à mon gabarit.

Vous n’avez d’ailleurs pas poursuivi votre concours…
Je courais après une telle performance depuis trois ans. Quand je suis sorti du plateau, je ne pensais pas au deuxième essai. On m’a dit : « T’es con, t’aurais pu aller chercher le record de France aujourd’hui ». Mais je n’étais plus dedans, il y a eu un long moment de décompression. C’était une configuration parfaite pour me faire une cheville sur le butoir… En plus, il y avait beaucoup d’engagés et donc une trentaine de minutes entre chaque lancer. J’ai préféré rester sur la bonne gestuelle du premier essai.

C’était le jet quasi parfait ?
Non. Il y avait du rythme et de la force mais c’est encore perfectible sur le plan technique d’après la vidéo. Je n’ai attaqué le qualitatif qu’il y a quinze jours. On s’en met encore dans le cornet. Je touche du bois mais, si tout se passe bien, ça devrait continuer à monter dans les semaines à venir.

Comment expliquer ce retour au premier plan après deux saisons difficiles ?
On dit souvent qu’il faut une année pour assimiler un nouveau type d’entraînement. Moi, il m’aura fallu deux ans. J’ai quitté l’Artois Athlétisme fin 2008 pour rejoindre le Lille Métropole Athlétisme et Eric Lepeuple. J’ai découvert une nouvelle façon de faire. L’an dernier, ça aurait déjà dû passer. Mais il y avait toujours un petit truc qui faisait que ça coinçait. Quand j’étais en forme, la technique ne suivait pas. Et quand cette dernière était en place, c’est le corps qui, cette fois, ne tenait pas. Je me suis fait un torticolis en début de saison. Puis j’ai couru après les minima, ce qui n’est jamais la bonne stratégie.

Vous avez douté ?
J’ai ressenti de la frustration l’an dernier. Mon record datait de début 2007. A chaque fois, début septembre, c’était dur de repartir. Mais je n’ai jamais baissé les bras. Si je n’y avais plus cru, j’aurais arrêté.

Ce sont maintenant les championnats d’Europe en salle de Paris Bercy qui se profilent…
Cette compétition, je l’ai programmée depuis deux ans avec mon entraîneur. Je pense être capable d’entrer en finale à Bercy. Honnêtement, ça serait même le minimum. J’avais terminé huitième à Birmingham il y a quatre ans. Il faut que je fasse mieux.

Pensez-vous désormais à la barrière des 21 m ?
Il ne faut pas brûler les étapes. 21 m, c’est encore autre chose. Je pense être capable de les atteindre. Peut-être pas cet hiver ni cet été. Je vois plus ça sur le long terme, avec en ligne de mire les Jeux olympiques de Londres en 2012. Il y a pas mal d’objectifs à réaliser avant les 21 m : 20,42 m, le record de France en salle, 20,50 m, les minima pour Daegu, et 20,72 m, le record de France en plein air.

Quelle est la suite de votre programme en salle ?
Je vais lancer toutes les deux semaines jusqu’aux championnats d’Europe. Je serai le 5 février à Amilly, pour le Big Shot. C’est un concours organisé par Jean-Pierre Horbaty (ndlr : l’entraîneur du junior Frédéric Dagée). Il a voulu monter une sorte de show à l’américaine. La compétition se déroulera dans un dojo réaménagé avec beaucoup de public, un peu dans le même esprit que le Perche Elite Tour. Je trouve le concept carrément bien. On sait pourquoi on y va. Il y aura de l’ambiance et presque tous les meilleurs Français. Ça va être super sympa.

On vous sent très confiant…
J’ai abattu beaucoup de travail depuis trois ans. J’ai pris le temps de l’assimiler. Ça aurait dû commencer à venir l’an dernier mais j’avais peut-être trop d’envie. Tout est entrain de se mettre en place. Avec du peaufinage et les réglages, je pense que je peux aller beaucoup plus loin qu’aujourd’hui…

Propos recueillis par Florian Gaudin-Winer pour athle.com

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